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LES POISSONS ARC-EN-CIEL

par Renaud LAVIGNE. (Revue Aquarama, 1991)
Les poissons arc-en-ciel, souvent bien-nommés, rivalisent de couleurs et de formes. Ils offrent l'occasion de réaliser un aquarium biotique de grande originalité et de toute
beauté.

Melanotaenia boesemani


LES MELANOTAENIIDAE:
Des représentants de cette famille sont connus depuis longtemps mais n'ont pas toujours suscité l'engouement des aquariophiles, malgré notre attrait pour les contrées éloignées. Ainsi en est-il de Melanotaenia maccullochi, par exemple. D'ailleurs, leur présence sur le marché était plus que sporadique, notamment au niveau du détaillant, et seul Telmatherina ladigesi, superbe poisson quand il est maintenu dans de bonnes conditions, était couramment proposé.
Depuis quelques années, consécutivement à une meilleure connaissance des biotopes aquatiques d'Océanie, d'autres espèces ont été découvertes puis, en égard à leur magnificence, rapidement recherchées par les connaisseurs. Citons, entre autres, Melanotaenia boesemani, archétype de ce genre de poissons hauts en couleur (et en forme!).
Cette famille comprend les genres suivants: Cairnsichthys, Chilatherina, Glossolepis, Iriatherina, Melanotaenia, Popondichthys, Rhadinocentrus et Telmatherina.

Glossolepis incisus
Forme caractéristique de la tête chez Glossolepis incisus


Le genre Glossolepis:
Un des genres les plus intéressants, renfermant les espèces G. incisus, G. maculosus, G. multisquamatus et G. wanamensis. La première se trouve facilement sur le marché et c'est fort heureux car elle est très belle. Glossolepis incisus est un poisson assez grand (environ 12 cm), d'une forme particulière, propre à ce genre ainsi qu'aux poissons arc-en-ciel s. s. (les Melanotaenia): le corps est comprimé latéralement et haut, ce qui le fait paraître important, d'autant que la tête semble proportionnellement réduite. Remarquons que toute la faune australisienne est souvent originale et endémique, conséquence du fait que cette région du globe a tôt été isolée, de sorte que l'évolution des espèces qu'elle abritait a suivi une voie différente de celle suivie sur les autres continents (les marsupiaux en sont l'exemple canonique), et les poissons n'échappent pas à la règle. Quant à sa robe, on croirait un poisson en tenue de soirée! Si la couleur, quoique vive chez les mâles, peut paraitre banale (rouge brique), on est réjoui par les jeux de lumière qui transforment les écailles en autant de paillettes réfléchissantes, à l'instar de certaines autres espèces telles les Piranhas. Ceci n'est donc pas unique, mais l'association de ce phénomène et de la couleur semble faire briller ces poissons de mille feux.

Iriatherina werneri


Le genre Iriatherina:
L'espèce Iriatherina werneri, originaire de Nouvelle-Guinée et d'Australie, est assez fréquemment proposée et, si elle n'a ni une taille impressionnnante (environ 4 cm), ni des couleurs éclatantes, la forme en est magnifique. Ce poisson assez terne, grisâtre avec quelques reflets jaunes et rouges, a des nageoires hypertrophiées, en particulier le mâle, plus encore que chez Telmatherina ladigesi. D'ailleurs, devrait-on parler de filaments plutôt que de nageoires, tant elles sont fines et longues!

Melanotaenia axeirodi
Melanotaenia affinis


Le genre Melanotaenia:
Ce genre, le plus important de tous, a donné son nom à la famille (genre éponyme), anciennement dénommée Atherinidae. Il comprend de nombreuses espèces: M. affinis, M. boesemani, M. eachamensis, M. fluviatilis, M. goldiei, M. gracilis, M. herbertaxelrodi, M. lacustris, M. irianjaya, M. maccullochi, M. maylandi, M. monticola, M. nigrans, M. oktediensis, M. papuae, M. parkinsoni, M. primaensis, M. splendide, M. sexlineata, M. trifasciata.
Quatre d'entre-elles se distingue par leur beauté, encore qu'il serait injuste de ne pas citer les autres... Ce sont M. boesemani, la plus courante, d'environ 8 à 10 cm de long, originaire de Nouvelle-Guinée, qui a la moitié postérieure du corps orange et la moitié antérieure bleu métallique, plus ou moins foncé selon l'âge, le sexe et l'état d'excitation (allant jusqu'à devenir presque noir durant le frai). M. parkinsoni est un peu plus grande (11 cm), également néo-guinéenne, et le corps bleu foncé est strié de lignes horizontales dorées ou oranges alors que les nageoires sont rouges. M. splendida, australienne, mesure quelque 9 cm et est d'aspect très variable, du fait de l'existence de nombreuses sous-espèces ou variétés. M. splendida var. rubrostriata peut assurément être considérée comme l'une des plus belles, avec un corps bleu à nombreuses lignes rouges contrastant superbement. Enfin, M. trifasciata, elle aussi australienne, est la plus grande avec une taille de l'ordre de 12 cm. Elle ressemble aux précédentes, avec un corps bleu foncé parcouru de lignes horizontales rouges et les nageoires rouges.

Melanotaenia splendida
Melanotaenia trifasciata
Melanotaenia nigrans


Toutes ces espèces sont caractérisées par la forme étrange décrite pour Glossolepis et, d'après les photographies illustrant cette article, vous n'aurez pas de mal à comprendre pourquoi elles ont été surnommées "arc-en-ciel". Notons cependant que la couleur et la forme ne sont définitivement fixées qu'après deux ans environ, les poissons présentant alors leurs plus beaux atours. Comme signalé, et comme c'est le cas pour bien d'autres de nos pensionnaires, l'intensité de la coloration varie selon l'état d'excitation (reproduction, domination) et le sexe.

Popondichthys furcata


Le genre Popondichthys:
L'espèce P. furcata est la plus belle et se rapproche d'Iriatherina ou Telmatherina. Si les couleurs ne sont pas en effet aussi vives que chez Glossolepis ou Melanotaenia, le corps ayant des reflets bleus et jaunes, les nageoires sont très développées et c'est donc sa physionomie en premier lieu qui fera vouloir acquérir cette petite espèce (4 cm) originaire de Nouvelle-Guinée et d'Australie.
Le genre Pseudomugil:
Parmi les espèces P. cyanodorsalis, P. inconspicuus, P. gertrudae, P. mellis, P. novaeguinae, P. paskai, P. paludicola, P. signifer et P. tenellus, l'avant-dernière est la plus fréquente mais l'aquariophile pourra avoir du mal à la dénicher...
Il s'agit d'un petit poisson, d'environ 5 cm, et plutôt terne, à l'instar des Popondichthys ou Iriatherina. Mais, comme eux, les nageoires sont magnifiquement développées, aux beaux reflets jaunes.

Telmatherina ladigesi


Le genre Telmatherina:
Est-il nécessaire de présenter Telmatherina ladigesi? Très beau poisson d'environ 8 cm, jaune avec une ligne horizontale centrale bleu azuréen et de grandes nageoires, particulièrement les mâles, il peuple depuis longtemps nos aquariums. Ce représentant illustre n'est originaire ni d'Australie, ni de Nouvelle-Guinée, mais des Célèbes, cette particularité rare lui conférant un attrait supplémentaire pour l'amateur d'originalité.
MAINTENANCE DES MELANOTAENIIDAE:
Là, de régie il n'y a point! Certains vivent dans les eaux douces (Pseudomugil), d'autres dans des eaux dures, voire saumâtres (Telmatherina). En ce qui concerne l'acidité, certains supportent des eaux acides de pH < (M. splendida), d'autres, tel M. boesemani, acceptent des pH > 8! Néanmoins, tous préfèreront une eau plutôt alcaline qu'acide et un pH compris entre 7 et 8 sera optimal. Enfin, ces poissons n'ont guère d'exigence en ce qui concerne la température, et se satisferont d'une eau chauffée entre 22 et 28 °C!
Un bac biotique présentant plusieurs de ces espèces sera donc rempli d'une eau ayant les caractéristiques suivantes:
TH: 10 à 20°f
pH: 7 à 8
t °: 24 à 28 °C
Eventuellement, on pourra y ajouter du sel, notamment pour Telmatherina (environ 1 g/1).

Bac de maintenance des Melanotaeniidés


Tous ces poissons étant grégaires, il faudra compter 100 litres minimum pour les petites espèces et 200 litres minimum pour les autres. Lors de la réalisation d'un aquarium réunissant des espèces de tailles très dissemblables (par exemple Melanotaenia boesemani et Iriatherina werneri), veiller à ce que les petites espèces ne souffrent pas de compétition alimentaire.
Du point de vue de la nutrition, ces poissons ne sont guère exigeants et acceptent les nourritures sèches de bonne qualité, en fines paillettes pour les petites espèces. Bien entendu, que cela ne dispense pas de leur distribuer de temps à autre de la nourriture congelée ou vivante (vers de vase, artémias . . .) dont ils sont friands. Il convient seulement d'avoir la main légère car, même s'ils avalent avec empressement, ils refusent généralement de manger l'excédent se retrouvant sur le sol ou les plantes.
En dernier lieu, si vos pensionnaires sont suffisamment agés et en bonne santé, vous assisterez sans doute à leurs ébats. M. boesemani frai à la faveur de la lumière aurorale, en pleine eau, près du sol ou des plantes, et le mâle, dont la couleur bleue s'intensifie, est saisi de tremblements de son corps qui invitent la ou les femelles à se reproduire; la ponte se déroule pendant quelques dizaines de minutes lors de brefs contacts plusieurs fois réitérés.

Bac d'elevage de Melanotaenia lacustris


DES PLANTES COMMENSALES:
Pour qui veut constituer un aquarium régional, voici une liste de végétaux croissant en Océanie:
Plantes australiennes:
Pour l'avant-plan: Lilaeopsis novae-zelandiae, Marsilea crenata.
Pour le second plan: Aponogeton elongatus, A. loriae, Isoetes velata, Marsilea drummondii, M. hirsuta, Otellia alismoides, Triglochin striata.
Pour l'arrière-plan: Blyxa aubertii, B. octandra, Brasenia schreberi, Caldesia parnassifolia, Nymphoides indica, Potamogeton lucens.
Plantes flottantes: Azolla filiculoides, A. pinnata, Utricularia gibba.
Plantes néo-guinéennes:
Pour l'avant-plan: Cryptocoryne venemae.
Pour l'arrière-plan: Vallisneria gigantea.
Peuvent s'y ajouter plusieurs espèces cosmopolites dont:
Pour le second plan: Eleocharis acicularis, Samolus valerandi.
Pour l'arrière-plan: Elodea canadensis. Potamogeton coloratus, P. crispus. P. filiformis, P. malaianus, V. spiralis. Plantes flottantes: Ceratophyllum demersum, C. submersum, Ceratopteris thalictroides, Lemna minor, Pistia stratiotes, Ricciocarpus natans.
Conclusion:
Issus de contrées lointaines, à l'antipode de notre pays, ces espèces très attrayantes méritent pleinement que leur soit consacré un aquarium au sein duquel les poissons arc-en-ciel créeront un véritable feu d'artifice, comme si tous les jours étaient fête.