Neolamprologus
sp. aff. boulengeri
par J-Luc RAVARD (A.F.C 681.67) © AA32 janvier 2002
Article paru dans la Revue Française des Cichlidophiles de Juin 1997
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Au mois de mars 1995, j'ai eu l'opportunité d'aquérir 5
sujets subadultes d'une espèce de cichlidés conchylicoles
du lac Tanganyika ; le plus grand mesurait 5cm alors que les 4 autres
ne mesuraient que 4cm. J'en déduisis qu'il devait s'agir d'un mâle
et de 4 femelles. C'est à une bourse cichlidophile organisée
par le Gasterosteus, club aquariophile allemand dont le local est à
Knieligen dans la proche banlieue de Karlsruhe que j'ai trouvé
ces poissons.
L'étiquette mentionnait Neolamprologus boulengeri qui est
un cichlidé conchylicole relativement proche de Neolamprologus
hecqui dont il se distingue essentiellement pour l'oeil du commun
des mortels par une coloration nettement plus jaune orangée.
Le doute concernant le nom du poisson commença rapidement à
m'envahir, malgré les explications détaillés du vendeur.
N'ayant pas apporté de documentation ce jour là et n'ayant
jamais vu cette espèce dans un magasin aquariophile, je me promis
de faire des recherches approfondies dans les revues et livres divers
que je possède à mon domicile.
Jai trouvé une fiche technique dans une ancienne revue RFC et mes
doutes furent confirmés ; de toute évidence, il ne s'agissait
pas de Neolamprologus boulengeri. Il ne restait que Neolamprologus
hecqui.
Lors du congrés 1995 à Vichy j'ai montré mes photos
à Mrs Bolline et Büscher qui me confirmèrent qu'il
ne s'agissait pas de Neolamprologus boulengeri, peut-être
Neolamprologus hecqui.
Certes, ces poissons ressemblent beaucoup à Neolamprologus hecqui mais ils s'en distinguent par une gueule un peu plus courte, des lignes de points bleutés sur les flancs et un liseré noir trés marqué et surligné de blanc sur la dorsale et la caudale. En fait, il s'avére que cette espèce est non décrite scientifiquement, d'ou le nom attribué au début de cet article.
Les
mâles atteignent une taille de 7cm alors que ma plus grande femelle
ne mesure que 6cm. Le corps est assez allongé et comprimé
latéralement. La coloration n'est pas trés brillante: sur
un fond gris brunâtre, des taches de couleur sombre et d'inégale
grandeur apparaissent ou disparaissent selon l'humeur des poissons (stress,parades...)
Ces marques mélaniques sont un peu plus marquées chez le
mâle que chez la femelle. Des petits points iridescents sont présents
sur cette robe. L'oeil, de couleur noire est cerné d'un disque
bleuté et est bordé d'une petite bande jaune dorée?
Les canines sont bien apparentes sur les deux mâchoires et les morsures
sont assez douloureuses quand on ne s'y attend pas. Mes 5 pensionnaires
furent installés dans un aquarium de 450 litres en compagnie d'autres
cichlidés provenant du même lac. L'eau est filtrée
dans un bac à décantation contenant un gros pain de mousse
; un filtre extérieur de forte capacité complète
ce dipositif ; un tiers du volume d'eau est changé tous les quinze
jours et j'en profite pour nettoyer le pain de mousse. La décoration
est assurée par de nombreux rochers placés en arriére
du bac et accueillent les autres pensionnaires.
Trés inféodés au fond de l'aquarium, ces poissons
territoriaux délimitent leurs térritoires respectifs autour
de la coquille d'escargot choisie par chacun comme demeure. Celle-ci est
âprement défendue contre les intrusions indésirables
; les coquilles d'escargot de Bourgogne conviennent parfaitement à
cet usage. Pour leur alimentation je privilégie la nourriture vivante:
artémias, enchytrées, daphnies, de la nourriture congelée
(mysis, krill, gammares), de même que la préparation "spéciale
cichlidés" à base de crustacés marins, moules,
épinards et petits pois finement mixée. Les vers de vase,
tubifex et coeur de boeuf sont prohibés.
Ayant
dispersé plusieures coquilles à différents endroits
du bac, trois femelles ne tardèrent pas à s'accaparer un
petit territoire de ponte où trônait la coquille choisie
dans la partie centrale. Le sable est légérement creusé
pour former une cuvette de 10 cm de diamètre sur un centimètre
de profondeur. Parfois, la coquille est disposée au milieu et donne
l'impression d'être déposée sur un monticule en surplomb
de la cuvette. Le sable est creusé à l'aide de la bouche
mais aussi par des vibrations du corps. Le mâle parade d'une femelle
à l'autre toutes nageoires déployées, entre et sort
de la coquille comme s'il voulait encourager la femelle à pondre.
Les oeufs sont déposés à l'intérieur de la
coquille et fécondés par le mâle. Les jours suivants,
la femelle reste à l'intérieur de sa demeure pour y ventiler
les oeufs. Tout juste peut-on brièvement la voir sortir comme l'éclair
lors des distributions de nourriture ; aprés une dizaine de jours,
les alevins apparaissent à l'ouverture et restent à proximité
immédiate de celle-ci, étroitement surveillés par
la mère. Le mâle participe à la surveillance en maintenant
les curieux à distance. Le nombre de jeunes varie de 30 à
50 environ. Il m'est arrivé une fois de voir les trois femelles
défendre simultanément leur progéniture respective,
le mâle ne sachant alors plus où donner de la tête.
Peu avant l'extinction des feux, les petits sont rassemblés dans
la coquille dont l'entrée est obstruée pars le corps de
la femelle durant toute la nuit.
En aquarium d'ensemble, le nombre d'alevins diminue de jour en jour. Pour
un élevage plus efficace je prélève la coquille contenant
la mère et les petits peu après l'extinction de la lumière
; le tout est placé dans un bac d'une quarentaine de litres. Les
alevins sont nourris plusieurs fois par jour de microvers et de nauplies
d'artémias ; leur croissance est assez rapide. La femelle est d'abord
assez timide puis, voyant qu'aucun danger ne menace, elle ne cache plus
ses petits pour la nuit ; elle est copieusement nourrie de proies vivantes
pendant deux semaines puis réintroduite dans l'aquarium d'ensemble
avec sa demeure vidée des alevins.
Ce cichlidé conchylicole de belle taille est de maintenance facile.
Toutefois je vous déconseille de le maintenir avec des espèces
conchylicoles trop petites (Neolamprologus ocellatus ou Neolamprologus
multifasciatus par exemple) car ceux-ci seraient irrémédiablement
dominés.
Un couple peut parfaitement convenir à un débutant cichlidophile
d'autant qu'un bac d'une cinquantaine de litres lui suffirait.