Site d'échanges et de partage d'informations sur l'aquariophilie et le milieu aquatique

Poissons de corail
Poissons d'eau de mer "rares"

par Joachim Frische - Datz 6/2000

Que signifie "rare"? - Le mot a t'il la même signification que : "à peine importé pour l'aquariophilie" ? Ou cela veut-il dire qu'une espèce n'habite qu'un petit territoire ?
Avec le développement continu de l'aquariophilie récifale de nombreuses petites espèces de poissons sont régulièrement importées, qui étaient à peine remarquées, il y a quelques années.
Parmi elles il y a toujours de nouvelles découvertes qui peuvent être exceptionnellement intéressantes pour l'aquariophile récifale. Quelques-unes de ces espèces font l'objet du présent article.

Poissons cardinaux de Banggai
Dès 1920 deux poissons semi-adultes, Pterapogon kauderni ont été découverts par le physicien Kaudern près des îles Banggai (Sulawesi). Probablement ces exemplaires ont-ils été envoyés au Muséum d'Histoire Naturelle de Leiden, où ils ont été décrit en tant que nouvelle espèce par F. P. Koumans en 1933. Mais peu après ce poisson est retombé dans l'oubli.
Rarement la redécouverte d'un poisson marin tropical n'a créé autant d'intérêt parmi les aquariophiles marins que cette espèce. C'est en mai 1996 que ce poisson a été mis sous le feu de l'actualité par le Troparium du Parc Animalier Hagenbeck. Au cours du même mois a été publié un article dans "Tropical Fish Hobbyist" concernant ce poisson par le réputé ichthyologue Gerald R. Allen. Ont suivi des articles de Grobe (1996) et Debelius (1996). Mais aussi en France des articles sont parus, par exemple de Frische (1996). Comment se justifient autant de publications en si peu de temps à propos d'un poisson atteignant à peine 5 cm ?
Si je me remémore la première description de Centropyge debelius trouvé par Helmut Debelius en 1990, ce nouveau poisson-ange nain nouvellement découvert a peu fait parler de lui.
Un catalyseur important a certainement été que le poisson-cardinal de Banggai a été présenté comme l'une des attractions lors d'Interzoo 1996 et traité comme tel. Entre temps le prix de vente a nettement diminué, mais est cependant encore considérable. Peu de temps après, ce poisson facile à récolter était proposé en grande quantité et le boom d'achat a duré longtemps. Moi-même, j'ai eu la chance d'acquérir les premiers P. kauderni à partir d'une importation directe provenant d'Indonésie. Entre temps d'autres animaux provenaient de Singapour.
En peu de temps il m'a été possible d'apprendre un certain nombre de choses concernant leur mode de vie. Les observations effectuées in situ par Gerald R. Allen ont constitué des informations importantes et pleines d'enseignements à propos de la maintenance de ces poissons.
Le poisson-cardinal de Banggai est relativement sensible au transport et doit par conséquent être manipulé avec précaution. Après quelques jours de soins des pertes importantes sont apparues. Même des animaux qui ont bien mangé dès le départ, peuvent être atteints durant la phase d'acclimatation par d'importantes attaques d'ectoparasites. Si par contre un stock important d'algues est présent dans l'aquarium, il n'y a presque pas d'apparition de maladie. Probablement que ceci est en rapport avec le biotope naturel de P. kauderni.
AIlen a trouvé ces poissons exclusivement parmi les algues et les herbiers, où ils vivent en bancs peu serrés. Comme P. kauderni fait plutôt partie des nageurs posés, il est facile, de le récolter en grandes quantités.
A cause de son biotope naturel il faut considérer la maintenance de P. kauderni en aquarium récifal d'une façon critique. La conservation en aquarium avec une croissance dense en Caulerpa est sans aucun doute conforme à l'espèce.
Dans un aquarium récifal avec 30 poissons-cardinaux de Banggai il a été possible d'observer correctement le comportement en groupe, tel qu'il se passe dans le biotope naturel. Hélas, mes trois exemplaires se comportent en solitaires ; seul dans les heures crépusculaires deux d'entre eux se rejoignent. Ce comportement a cependant changé de façon brutale, lorsque j'ai fait l'acquisition de six exemplaires supplémentaires. A partir de ce moment ils se sont regroupés. Ceci laisse supposer que P. kauderni vit en communauté de grands groupes, en présence d'un nombre restreint d'individus par contre, ils restent solitaires.
La commercialisation exceptionnelle de Pterapogon kauderni se déroule entre temps de manière si professionnelle et organisée que l'on est droit de se faire du souci quant au stock de ce poisson unique, incubateur buccal endémique, car finalement il n'a été repéré jusqu'à présent que près de trois des îles Banggai.
Toutefois il y a aussi un motif d'espoir. Jürgen Grobe décrit la reproduction réussie maintes fois de Pterapogon kauderni. Et ce n'est pas tout ! Il signale la reproduction comme relativement simple étant donné que le mâle lâche les jeunes à la taille d'environ un centimètre. A cette taille les petits Banggai sont déjà capable de consommer des nauplies d'Artemia fraîchement éclos et même des Cyclops (observations qui ont été confirmées à plusieurs reprises).
J'ai appris auprès de quelques commerçants que les P. kauderni éclosent également chez les exportateurs et sont en partie même élevés. A partir de ces premiers succès et d'un engagement correspondant, il serait possible de développer rapidement une multiplication de routine, qui finalement dispenserait totalement ou en grande partie le prélèvement dans la nature. Reste à espérer que d'ici là le Pterapogon kauderni ne soit pas délaissé par les aquariophiles - comme cela a déjà pu être observé en ce qui concerne certains poissons d'eau douce.

Poisson comète jaune et bleu
Les poissons-comètes du genre Assessor se présentent d'une autre manière comme exceptionnels. Déjà en ce qui concerne les noms d'espèce règne apparemment quelque confusion. Tandis que l'attribution du nom est sans équivoque pour Assessor flavissimus, il semble qu'en ce qui concerne la deuxième espèce - nommée comme Assessor macneilli chez Burgess et Baensch & Debelius, cela soit plus problématique. Un poisson-comète pour le moins déconcertant de la même coloration se retrouve pourtant sous le nom d'Assessor randalli chez Debelius dans son livre paru deux années plus tard " Guide des poissons du sud-ouest asiatique". Ce nom apparaît aussi dans le livre "Poissons du monde" de Masuda et Allen. Les deux livres constituent les deux seules publications à ma disposition, dans lesquels Assessor randalli est cité. S'agit-il vraiment d'une troisième espèce du genre Assessor ? D'une manière surprenante Debelius ne parle pas de Assessor macneilli dans son guide, bien que œtte espèce soit présente dans le territoire géographique traité. (Remarque de la rédaction: Lieske & Myers 1994 évoquent aussi Assessor randalli. Il doit ressembler à Assessor macneilli et être présent près des îles Ryukyu).
Une particularité des Assessor est leur taille totale d'un maximum de six centimètres. Effectivement ces poissons conviennent bien pour les petits aquariums récifaux. En contrepartie à Calloplesiops ils ne chassent pas les petits poissons et les crevettes.
Dans leur comportement de soin parental ils se différencient aussi des grands poissons-comètes. Tandis que ceux-ci fixent leurs œufs au plafond d'une grotte, les espèces du genre Assessor pratiquent l'incubation buccale. La surveillance et le soin des œufs est le travail du mâle chez tous les Plesiopidés.
Dans la nature Calloplesiops vit en couple et peut aussi être maintenu en couple dans de grands aquariums. les espèces du genre Assessor par contre vivent en "écoles". Maintenus à plusieurs dans un aquarium, chaque membre du groupe défend certes un petit territoire personnel, cependant ceci ne donne pratiquement pas lieu à des disputes.
Dans les aquariums récifaux ces petits poissons-comètes s'acclimatent rapidement et acceptent en même temps que de la nourriture congelée des paillettes. Il est risqué toutefois de les associer avec des espèces de la famille des Pseudochromidés, qui possèdent une forme corporelle similaire et qui ont généralement un comportement agressif face aux poissons-comètes. Les poissons-comètes sont absolument dominés par les Pseudochromidés.
Étant donné que les espèces du genre Assessor proviennent essentiellement des récifs australiens, ils ne sont exportés que de manière sporadique vers l'Europe et vendus relativement chers - peut-être leur seul inconvénient.

Le gobie de Rainford
Ce poisson rayé de rouge pouvant atteindre 6.5 cm se rencontre également rarement dans le commerce. Il provient d'Indonésie ( Mer de Flores au îles Marshall, au sud jusqu'à la mer de Corail) et habite le substrat vaseux des côtes et lagunes récifales.
Toutes les espèces du genre Amblygobius se nourrissent de détritus et de petits invertébrés vivant au sol, en prenant du sable dans la bouche et en le mâchonnant. Le sable tamisé est de nouveau expulsé par les fentes branchiales.
Leur énorme rapidité et leur mode de vie timide et caché pourrait constituer la raison principale pour l'importation rare du gobie de Rainford.
Le mode de vie de ce gobie est - comme chez beaucoup d'espèces de la famille des Gobidae - territorial. Les juvéniles vivent en solitaire, les individus matures vivent par contre en couple. Malheureusement ce gobie ne présente pas de différences sexuelles extérieures, excepté de la forme de la papille génitale, ce qui est cependant à peine suffisant à les différencier dans le bac du commerçant.
Contrairement aux autres espèces du genre Amblygobius rainfordi ne s'enterre que rarement dans son tuyau qui lui sert d'habitat. Comme abri l'espèce recherche le plus souvent des niches de la décoration proches du sol.
L'acclimatation de Amblygobius rainfordi n'est pas difficile. Durant les premières semaines décisives les animaux ont un comportement si craintif, qu'ils ne reçoivent pratiquement rien lors de la distribution de nourriture. Une ration généreuse principalement de petite nourriture est conseillée dans tous les cas durant la période d'acclimatation. L'acquisition d'animaux déjà bien amaigris est déconseillée, car ils ne peuvent plus profiter de la nourriture et sont ainsi des candidats à la mort. Les juvéniles amaigris ont le moins de chance.
La distribution journalière au cours des premières semaines de nauplies d'Artemia ou d'une nourriture identique en complémentarité de l'alimentation normale s'est avérée bénéfique. Les animaux ne s'acclimatent que lentement et deviennent lentement plus confiants. Si on les a maintenus avec succès durant six mois, il y a l'espoir de maintenir et de pouvoir observer sur le long terme l'un des gobies le plus intéressant dans son aquarium récital. Le gobie de Raintord a t'il appris à saisir de la nourriture en pleine eau, il consomme rapidement des Artemia adultes, du mysis et des larves de moustiques. Selon mes observations il refuse la nourriture en paillettes.
Même si le gobie a appris à saisir de la nourriture dérivante, il consacre l'essentiel de son temps à la recherche de nourriture, au mâchonnement du sable à la recherche de micro-organismes. A la condition toutefois de posséder un sol à fine granulométrie ; le sable de corail est bon, le sable de foraminifères est meilleur. Cet ameublissement du sol a un effet positif sur le milieu. Ainsi les algues visqueuses ont-elles plus de difficultés à s'établir sur le substrat en présence de A. rainfordi. Contrairement à quelques autres gobies les invertébrés établis au sol ne sont pas importunés par A. rainfordi, si bien qu'il est possible de les maintenir en aquarium récifal sans aucune arrière pensée.
Delbeek & Sprung (1996) ont effectué une observation exceptionnelle avec Amblygobius rainfordi : le gobie de Rainford consomme des algues filamenteuses, un comportement, que j'ai aussi pu observer. Le gobie arrache les algues, pour en former un paquet en les mâchonnant, qu'il avale ensuite. Ce comportement ne m'était jusqu'à présent connu que de Amblygobius bynoensis. Ainsi j'ai réussi à stopper et même à complètement éradiquer une poussée de croissance d'algues filamenteuses lors de la phase de rodage de mon aquarium récifal construit en forme de L .

Bibliographie
Allen, G.R. (1996) : The king of the cardinalfishes, Pterapogon kaudemi. Trop. Fish Hobby. 44(5) : 32-45.
Baensch, H. A. & H. Debelius (1992): Meerwasser Atlas. Melle.
Burgess, W.E., H.R. Hunziker (1988) : Dr. Burgess Atlas of Marine Aquarium fishes. Neptune City, New Jersey.
Debelius, H. (1996): lm Seegras-Biotop wiederentdeckt: der Kardinalbarsch Pterapogon kauderni. Aquarium Heute 14 (3): 364-366.
Debelius, H. & R. Kuiter (1995): Fischführer Südostasien. Melle.
Delbeek J.-C. & J. Sprung (1996): Das Riffaquarium. Bornheim
Frische J. (1996) : Pterapogon kauderni, le poisson-cardinal de l'île Banggai. Aquarama 28 (3) : 44-47.
Grobe, J. (1996) : Pterapogon kauderni, reproduction réussie. das Aquarium 328 (10) : 35-39
Lieske, E. & R.F. Myers (1994) : Korallenfische der Welt. Hamburg.
Luther, T. (1996): Der Wunderfisch - Zur Pflege und Fortpflanzungsbiologie des schwarzweissen Pterapogon kauderni. das Aquarium 324 (7): 27-29.
Masuda, H. & G.R. Allen (1993): Meeresfische der Welt. Melle.
Richter, U. (1996): Neues aus dem Troparium: Pterapogon kauderni. Datz 49 (5): 279.

© Extrait de la Gazette Marine N° 78 - janvier 200
Publication réservée aux membres des Amis de l'Aquarium 1932.