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L'ADAPTATION DES EAUX

par Renaud LAVIGNE. (Revue Aquarama, 1990)
Les aquariophiles désireux de réaliser des aquariums biotiques ou de réussir des reproductions délicates, se voient contraints de disposer d'eaux dont les caractéristiques sont parfois fort éloignées de celles de l'eau de conduite. Cet article donne des conseils pratiques pour modifier les trois paramètres principaux que sont la salinité, la dureté et le pH.

NOTIONS SIMPLES DE CHIMIE DES EAUX
Pour bien comprendre ce que sont la salinité, la dureté et le pH, voici quelques rappels élémentaires de chimie: la matière est constituée d'atomes, eux-mêmes formés de particules telles le proton et l'électron. Ainsi, l'atome comportant 1 proton est appelé "Hydrogène"; celui en comportant 8 est appelé "Oxygène" celui en comportant 92 est appelé "Uranium", etc. A chaque atome correspond un nombre unique de protons.
Plusieurs atomes peuvent se combiner entre eux pour former une molécule, qui est l'entité, la plus petite ayant les propriétés de la matière qui en est composée. Par exemple, la molécule d'eau, de formule H20, est formée de 2 atomes d'Hydrogène (H) et d'1 atome d'Oxygène (0). Une molécule d'eau possède les mêmes propriétés que toute l'eau des Océans et ces propriétés sont différentes de celles des atomes d'Hydrogène et d'Oxygène qui la constituent.
Les atomes, comme les molécules sont électriquement neutres car ils renferment autant d'électrons (de charge négative) que de protons (de charge positive): il y a 1 électron dans l'atome d'Hydrogène, 8 dans celui d'Oxygène ...
Là où les choses viennent à changer, c'est justement dans l'eau! En solution aqueuse, les espèces chimiques sont présentes sous forme d'ions, c'est-à-dire d'atomes ou de molécules dont la charge électrique n'est plus nulle, parce que le nombre d'électrons n'est plus égal au nombre de protons. Il existe donc des ions chargés négativement (ayant plus d'électrons que de protons, nommés anions) et des ions chargés positivement (ayant plus de protons que d'électrons, nommés cations). Ainsi, l'Oxygène (8 protons + 8 électrons) donne l'ion appelé "Oxyde" qui a 2 électrons en plus et dont 18 symbole chimique est donc 02-; de même, l'Hydrogène (1 proton + 1 électron) donne l'ion appelé "Hydronium" qui a 1 électron en moins et qui est symbolisé H+. Comme la matière est globalement neutre (on ne ressent pas d'électricité en touchant l'eau), il y a toujours assez d'ions chargés positivement pour neutraliser les ions chargés négativement et vice-versa. Lorsqu'ils s'associent, ils forment ce que l'on nomme un "sel". C'est de ces différents sels ou ions que dépend la qualité d'une eau et c'est à partir d'eux qu'on définit les notions de salinité, dureté ou pH.
LA SALINITE
DEFINITION:
La salinité, comme l'indique le terme (une fois n'est pas coutûme!), représente la concentration totale en sels contenus dans l'eau. Rappelons que pour le chimiste, un sel est l'assemblage de deux ions de charges électriques opposées, quels qu'ils soient, et non uniquement le sel qu'on ajoute aux aliments, qui est composé de l'anion chlorure et du cation soldium. Des dizaines d'ions négatifs (bicarbonate, sulfate, chlorure, nitrate .. .) et d'ions positifs (calcium, magnésium, sodium, potassium, cuivre . . .) peuvent résulter de centaines de sels différents!
MESURE:
La salinité se mesure en mg/I mais n'est pas usitée des aquariophiles. On lui préfère la conductivité, mesurée en uS/cm2. La conductivité est la capacité d'une eau à conduire le courant électrique. Elle est donc proportionnelle à la concentration en ions (chargés électriquement, nous l'avons vu) et donc à la concentration en sels. Et voilà! Le problème est que les ions ne conduisent pas tous le courant de la même façon, si bien que la corrélation conductivité-salinité reste approximative. Mais cela n'a guère d'importance pour l'aquariophile.
On considère ainsi qu'une conductivité de 100 µS/cm2 correspond à quelque 50 mg/I de sels. Une eau "moyenne" contient environ 200 mg/I de sels et a une conductivité d'environ 400 µS/cm2; une eau douce renferme environ 50 mg/I de sel et a donc une conductivité d'environ 100 µS/cm2; une eau dure, environ 1000, soit une conductivité d'environ 2000 µS/cm2; une eau saumâtre, environ 10 000, soit 10 g/I, c'est-à-dire une conductivité de l'ordre de 15 000 µS/cm2.
INTERET:
Pour de très hautes teneurs en sels, on peut corréler la salinité à la densité, utilisée couramment en aquariophilie d'eau de mer. La salinité est une mesure globale qui est supérieure à la mesure de la dureté (cf. plus loin) puisque tous les sels sont dosés, et l'on a donc ainsi des renseignements importants concernant la qualité de l'eau. Ainsi, l'eau de mer n'a pas une dureté aussi élevée que ne le laisserait supposer sa très haute salinité car la majeure partie de ses sels est constituée de chlorure de sodium, sel qui n'intervient pas dans la dureté de l'eau. De même, un aquariophile ayant traité un bac avec du sel (contre une maladie ou pour acclimater des poissons d'eau saumâtre) et qui mesurerait la dureté retrouverait la valeur originelle et ne pourrait savoir ce qu'il a fait exactement, alors qu'une mesure de la salinité lui indiquerait qu'il a ajouté du sel et dans quelles proportions! Ce qui est d'un grand intérêt puisqu'il éviterait ainsi d'utiliser cette eau pour d'autres poissons, qui, eux, n'apprécieraient pas forcément une teneur élevée en sel! A l'inverse, le maintien de certaines espèces (Black-mollies, Guppy, Platies, Xyphos, Etroplus, Telmatherina ...) sera favorisé dans une eau ayant une conductivité de l'ordre de 5000 µS/cm2; les poissons d'eau saumâtre ne seront à leur aise que dans une eau dont la conductivité dépassera 10 000 µS/ cm2. Dans une eau douce, de tels poissons peuvent rapidement développer des maladies comme les mycoses.
CORRECTION:
Augmentation de la salinité:
Pour augmenter la salinité, il suffit d'ajouter du sel dans l'eau. Le gros sel de cuisine fait l'affaire. Un ajout de 1 g de sel par litre d'eau conduit à une augmentation de salinité d'environ 2000 µS/cm2.
Exemple: pour maintenir des vivipares, on choisit une conductivité de 4000 µS/cm2 alors que l'eau a une conductivité de 1000 µS/cm2; il faudra ajouter (4000-1000)/ 2000 = 1,5 g/I de sel, soit 150 g pour 100 litres.
Diminution de la salinité:
Pour baisser la salinité, il faut diluer l'eau avec de l'eau moins saline (plus douce). Généralement, l'aquariophile doit donc avoir recours à de l'eau distillée, déionisée ou osmosée, mais peut également utiliser des eaux minérales très douces ou des eaux de source de sa région. Connaissant la salinité S1 de son eau, la salinité S2 désirée et le volume V2 voulu, il suffira de mélanger le volume V1 = (V2 x S2)/S, de son eau avec son complément (V2-V1) d'eau pure.
Exemple: à partir d'une eau de salinité égale à 1500 µS/cm2, on veut obtenir 100 litres d'eau de salinité 600 µS/cm2. On calcule V1 = (100 x 600)/1500 = 40 1. Il faut donc mélanger 40 I d'eau usuelle avec 60 I d'eau pure.

En-Haut: Conductivimètre L 17
En-bas: L 21 tous deux permettent de mesurer rapidement la conductivité de n'importe quelle eau.


LA DURETE
DEFINITION:
La dureté totale (TH) est la grandeur caractérisant la concentration en ions métalliques non alcalins, c'est-à-dire de tous les cations qui ne sont pas en particulier hydronium (Hl, sodium (Na+) ni potassium (K+). Partiquement, cela correspond à la concentration en ions calcium (Ca++) et magnèsium (Mg++), les autres cations concernés (aluminium, cuivre, fer . . .) étant en concentrations bien moindres. On distingue la dureté temporaire constituée par les anions carbonate (CO3+) et bicarbonate (HCO3-), dont les teneurs peuvent varier (d'où le nom), et la dureté permanente constituée par les autres anions: sulfates (SO4-), chlorures (Cr), nitrates (NO3-), nitrites (NO2 )...
On a donc: TH (dureté totale) = TAC (dureté temporaire) + TP (dureté permanente)
MESURE:
Ces duretés s'expriment en degrés (français chez nous), le degré français étant défini comme correspondant à une teneur de 10 mg/I du sel "carbonate de calcium", trivialement appelé calcaire (1 = 0,56 °d). Les tests aquariophiles donnent la valeur en degrés, mais le chimiste peut calculer la dureté d'après la concentration en différents ions; ainsi, on a les relations suivantes (les teneurs étant exprimées en mg/l):
TH = 0,25 (Ca2+) + 0,411 (Mg2+) + 0,179 (Fe3+) + 0,371 (AI3+) + ...
TAC = 0,167 (CO32-) + 0,082 (HCO3-)
TP = 0,104 (SO42-) + 0,141 (CI-) + 0,081 (NO3-) + ...


Généralement, on mesure les duretés totale (TH) et temporaire (TAC) pour en déduire la dureté permanente, selon TP = TH - TAC. Mais on peut approximer la dureté d'après la salinité, sachant que 1 °f correspond à quelque 30 µS/cm2.
Le TH d'une eau naturelle est compris entre 5 °f et 20 °f dans la plupart des cas. Le TH est un critère de potabilité d'une eau et les eaux minérales, rarement très douces (justement parce qu'elles sont "minérales"), peuvent être très dures, voire non potables selon les normes européennes en vigueur (Contrex: TH = 155 ou Vittel Hépar: TH = 184!).
Si le TH est inférieur à 5 °f, l'eau est dite très douce; s'il est compris entre 5 et 10 °f, elle est douce; entre 10 et 20 °f, elle est moyennement dure; entre 20 et 40 °f, elle est dure; au-delà, elle est très dure. Par abus de langage, on dit également que l'eau est calcaire, alors que le calcaire ne constitue qu'un des nombreux sels intervenant dans la dureté de l'eau.

EAU
TH
très dure
40 °f
dure
20 - 40 °f
moyennement dure
10 - 20 °f
douce
5-10 °f
très douce
<5 °f


INTERET:
Longtemps appréciée comme un critère fondamental pour la maintenance des espèces aquatiques, la dureté n'apporte qu'une partie des informations qu'il convient de connaître puisqu'elle ne tient pas compte des sels de sodium, de potassium et quelques autres, qui peuvent néanmoins être en concentration extrêmement élevée (eaux saumâtres). Cependant, elle reste une mesure facile et effectuée couramment car, dans la majorité des cas, les eaux analysées sont douces et peu salines, de sorte que les concentrations en ions sodium et potassium sont peu influentes. La dureté totale peut alors être corrélée avec une bonne approximation à la salinité (1 °f = 30 µS/cm). La connaissance de la dureté permet d'envisager un peuplement raisonnable d'espèces, c'est-à-dire dont l'adaptation est facilitée dans une telle eau. On connait en effet des espèces d'eaux très douces (Discus, Rasboras, Characidée . .) ou dures (Vivipares, Cichlidés . . .). La connaissance supplémentaire de la dureté carbonatée (TAC) présente un intérêt certain. En effet, les ions dosés au cours de cette analyse interviennent directement dans ce que l'on nomme "effet tampon" (cf. pH) et un TAC élevé (néanmoins toujours inférieur au TH) permettra à l'eau d'amortir les fluctuations de pH et offrira donc aux poissons un milieu plus stable, donc plus sûr.

Osmoseur à compresseur de Millipore


CORRECTION
Diminution de la dureté:
Agir sur le TH revient à faire varier la concentration en sels de calcium ou magnésium. Deux procédés s'offrent à nous pour baisser la dureté:
- On dilue l'eau avec de l'eau pure (distillée, déionisée, osmosée) ou très douce (de pluie, de source, Volvic . . .). Connaissant le TH1, de son eau et désirant V litres d'eau de TH2, on mélangera V1 = (V x TH2)/TH1 litres de son eau avec son complément d'eau pure (V2 = V - V1). Par exemple, si on désire 100 I d'eau à TH = 15 alors que l'eau a un TH de 20, on mélangera V1 = (100 x 15)/20 = 75 l de son eau avec V2 = 100 - 75 = 25 I d'eau pure.
- L'ébullition de l'eau entraîne la précipitation des carbonates sur les parois du récipient (le tartre). Le TH est ainsi abaissé puisque le TAC est éliminé et la baisse est donc fonction de la valeur originelle du TAC, qui peut être nulle comme très importante. Cette méthode n'est cependant pas recommandable car l'eau ainsi obtenue est privée de son pouvoir tampon.
Augmentation de la dureté:
Si la diminution du TH par ajout de produits chimiques est impossible en respectant les conditions biologiques, son accroîssement est facile à réaliser par ce moyen. On pourrait, de la même façon
que précédément, diluer son eau avec de l'eau pure, mais ceci est souvent impossible car on dispose rarement d'une eau plus dure que celle du robinet. Par conséquent, la méthode la plus simple et très économique consiste à dissoudre des produits chimiques qui vont augmenter la teneur en ions calcium ou magnésium, c'est-à-dire d'ajouter des sels de ces deux métaux! Voici les doses à utiliser, en g/I, pour deux sels différents, l'un n'ayant pas d'action sur le pH: le sulfate de calcium (CaSO4); l'autre, l'hydrogénophosphate de magnésium (MgHPO4) entraînant une augmentation simultanée du pH, ce qui peut être préférable, une eau dure étant naturellement plus basique qu'une eau douce:
Par exemple, si l'on désire élever le TH de 50 I d'eau de 10 °f (pour ses Cichlidés préférés!), on ajoutera 50 x 0,17 = 8,5 g de sulfate de calcium dihydraté; si on veut élever le TH de 400 I d'eau de 15 °f, on ajoutera 400 x 0,26 = 104 g de ce sel.


LE PH
DEFINITION:
Le pH est une grandeur caractérisant la concentration en ions H+ d'une solution. Plus le pH est faible, plus la concentration en ions H+ est grande, plus l'eau sera acide. Dans l'eau, il varie entre 0 et 14; s'il est inférieur à 7, l'eau est dite acide (parce que les acides ont la propriété de libérer des ions H+ en grand nombre); s'il est supérieur à 7, elle est basique ou alcaline (parce que les bases ont la propriété d'appauvrir l'eau en ions H+); s'il est de 7, l'eau est dite neutre (car tous les ions H+ en excès sont neutralisés):
MESURE:
La valeur du pH résulte d'un artifice mathématique et s'exprime sans unité (pas plus en mg/I qu'en cheval-vapeur). C'est un simple nombre. A ce stade, une remarque: c'est que, du fait de cet artifice, on oublie que la concentration en ions H+ varie énormément plus vite que le pH. Ainsi, entre pH 6 et 7, il ne semble pas y avoir beaucoup de différences, mais l'eau est dix fois plus acide dans le premier cas! Entre deux eaux de pH 5 et 8, la différence est d'un facteur 1000!
Pour fixer les idées, le pH d'une eau naturelle est généralement compris entre 6 et 8; le pH de l'eau d'adduction est d'environ de 7 à 7,5; celui du vin de 4...
La mesure du pH s'obtient par méthodes colorimétriques (les tests aquariophiles) ou électriques. Ces dernières utilisent un appareil, le pH-mètre électronique, très précis et dont les meilleurs modèles offrent un affichage direct de la valeur sur un écran numérique à cristaux liquides.

Les pH-mètres analogiques ou digitales permettent un contôle plus précis des variations lors d'un ajustement


INTERET
Le pH régit la plupart des réactions biochimiques ou chimiques se déroulant en solution et peut donc fortement influer sur les processus métaboliques. Un poisson plongé dans une solution trop acide ou trop basique meurt rapidement (d'acidose ou d'alcalose). Un symptôme fréquent d'une inadéquation d'une eau est que le poisson se recouvre d'un voile blanchâtre, signe de l'agression chimique que subit la peau; de même, si le poisson est brutalement transféré dans une eau dont le pH est très différent de celui de l'eau dont il est issu (par exemple, du pisciculteur au revendeur ou du revendeur à l'amateur), il peut subir un stress chimique conduisant à sa mort rapide. Ce paramètre est donc fondamental en aquariophilie et son importance est d'ailleurs connue depuis longtemps. De là, l'intérêt qu'une eau soit tamponnée, c'est-à-dire que les fluctuations du pH soient faibles, même si l'on y ajoute des acides ou des bases. C'est sans doute le test le plus communément pratiqué. Les poissons d'eau douce nécessitent un pH compris entre 6,5 et 7,5, certains, notamment les espèces d'eaux très douces, demandant un pH légèrement infèrieur (entre 6 et 7); d'autres, d'eaux calcaires, préfèreront des valeurs plus élevées (entre 7 et 8). Les espèces marines quant à elles, ne seront bien que dans des eaux dont le pH est légèrement supérieur à 8 (8 à 8,5).
CORRECTION
Diminution du pH
Pour baisser le pH, il faut ajouter des acides dans l'eau. En effet, on ne peut procéder par mélange d'eaux de pH différents, du moins de façon rigoureuse, car il n'y a pas proportionnalité entre la quantité d'acide d'une eau et son pH: ainsi, si on mélange 1 I d'eau de pH 7 avec 1 I d'eau de pH 5, on obtient certes 2 I d'eau, mais le pH résultant est de 5,3 et non 6! Et encore s'agit-il d'un cas idéal, car cela varie en plus selon le pouvoir tampon de l'eau! A éviter donc, d'autant que d'autres paramètres, tels le TH ou la salinité sont modifiés de façon incontrôlable.
On utilisera donc un produit comme l'hydrogénophosphate de sodium (NaHPO4) ou le dihydrogénophosphate de potassium (KH2PO4). Mais on ne peut cependant pas calculer a priori la quantité nécessaire car celle-ci varie fortement selon la composition de l'eau, que la seule connaissance de son pH et de son TH ou de sa salinité ne peut suffire à déterminer. Par conséquent, ce sera l'expérience qui permettra d'évaluer la dose nécessaire. A un litre de votre eau, ajoutez la masse nécessaire (de l'ordre de 10 mg!) pour abaisser le pH à la valeur désirée; cette valeur, multipliée par le volume, en 1, de votre bac, vous indiquera la quantité totale de produit à ajouter.
A titre indicatif, voici les ajouts approximatifs, en mg/I de KH2PO2PO4, permettant de diminuer le pH d'une eau en fonction de sa dureté:


Exemple 1: on veut abaisser le pH de 120 I d'eau douce de 7,5 à 6,5: on additionne les chiffres compris entre ces deux valeurs, soit 15 et 50, ce qui donne 65. La dose s'obtient en multipliant ce chiffre par le volume du bac: 65 x 120 = 7800 mg soit 7,8 g de KH2PO4.
Exemple 2: on veut abaisser le pH de 500 I d'eau dure de 8 à 6,5: il faut ajouter (15 + 35 + 130) x 500 = 90 000 mg soit 90 g de KH2PO4.
Remarque:
La correction, lente, tout comme dans le cas d'une augmentation, ne devra pas excéder 0,3 unité pH par jour en présence d'êtres vivants, conséquence du fait que l'échelle de pH n'est pas linéaire et qu'une telle correction correspond déjà à une variation selon un facteur 2 de la concentration en ions H+, c'est-à-dire de l'acidité! D'où l'intérêt d'un pH-mètre électronique, qui seul permet un contrôle sûr de l'opération.
Augmentation du pH:
Au lieu d'ajouter un acide (et à défaut de pouvoir en retirer!), on ajoutera une base, telle le carbonate de sodium (Na2CO3) ou l'hydrogénophosphate de calcium (CaHPO4). La méthode à respecter est la même que celle décrite précédemment.
En outre, voici les quantités approximatives (dépendant de la qualité de votre eau) de Na2CO3, en mg/I, à ajouter en fonction de la dureté de l'eau (celle-ci n'étant pas modifiée):


Exemple 1: on veut accroître le pH de 200 I d'eau moyennement dure de 6 à 8: il faudra (35 + 35 + 30 + 25) x 200 = 25 000 mg soit 25 g de Na2CO3.
Exemple 2: pour augmenter le pH de 100 I d'eau dure de 7 à 8, on ajoutera (40 + 35) x 100 = 7500 mg soit 7,5 g de Na2CO3.
Remarque:
Contrairement au bicarbonate de sodium (NaHCO3), le carbonate de sodium peut être utilisé pour corriger le pH d'eau de mer car il est plus basique et permet donc de dépasser des pH de 8. J'ai moi-même obtenu de très bons résultats en remontant le pH d'eaux de mer depuis 7,5 ou moins jusqu'à 8 à 8,5, et ce, sans aucun problème pour les poissons. Une telle correction est impossible avec le bicarbonate de sodium et si l'eau de mer présente un pH proche de 8, par exemple 7,8, l'addition de ce produit ferait baisser le pH alors que quelques grammes de carbonate de sodium suffisent pour corriger le pH d'un bac de 100 I.
CORRECTION SIMULTANÉE DU pH, DU TH ET DE LA SALINITÉ
La modification concomitante de ces paramètres est plus délicate. Le tableau suivant résume les actions des différents produits que l'on ajoutera à l'eau:


Dans le cas d'une augmentation simultanée du pH et du TH, on utilisera donc MgHPO4, 7H20 pour d'abord corriger le TH, puis Na2CO3 pour finir de corriger le pH si celui-ci demeure trop bas. Si le TH est correct mais le pH trop fort, on ajoutera KH2PO4. Si le TH est trop faible mais le pH correct, on utilisera CaSO4, 2H20, etc. En ce qui concerne les quantités à utiliser, on se réfèrera aux tableaux et formules antérieurement donnés.
Exemple: on souhaite porter le TH de 100 I d'eau de 15 à 20 et porter le pH de 6,5 à 7,5. On commencera donc par ajouter 0,12 x 100 = 12 g de MgHPO4, 7H20. Le pH aura légèrement augmenté (par exemple jusqu'à 7) et il ne sera nécessaire d'ajouter que la dose permettant de passer de pH 7 à pH 7,5. Pour effectuer ceci, sans modifier le TH, maintenant bon, on utilisera du Na2CO3 à la dose de 35 mg/I soit 3,5 g en tout.
CONCLUSION
L'eau dont dispose les aquariophiles n'est que rarement adaptée à l'usage que l'on veut en faire. Pour qu'elle soit compatible avec les peuplements envisagés, on doit donc modifier ses caractéristiques. Il est sûr que la meilleure méthode consiste à renoncer à ses exigences et à porter son choix sur des organismes pour qui cette eau serait convenable, mais de n'est généralement pas la solution que l'aquariophile préfère. Quant au professionnel, il ne peut se le permettre. Pour de nombreuses espèces, on doit alors changer la qualité de l'eau, principalement sa dureté, sa salinité et son pH. Hormis l'abaissement du TH, la simple addition de produits chimiques idoines permet d'atteindre le but recherché à faible coût et sans danger si l'on prend garde de respecter les conseils donnés dans cet article.
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RÉSUMÉ
Salinité:
Augmentation: NaCI = chlorure de sodium = sel de cuisine
Dureté:
Augmentation: CaSO4, 2H20 = sulfate de calcium dihydraté
MgHPO4, 7H20 = Hydrogénophosphate de magnésium heptahydraté = phosphate alcalin de magnésium heptahydraté
pH:
Augmentation: Na2CO3 = carbonate de sodium
Diminution: KH2PO4 = dihydrogénophosphate de potassium phosphate acide de potassium
Nota: si les produits ne contiennent pas la même proportion d'eau (par exemple: MgHPO4, 3H20 et non MgHPO4, 7H20), les quantités devraient, en toute rigueur, être réestimées (plus faibles quand il y a moins d'eau, plus fortes sinon), mais les valeurs conseillées sont approximatives et demeurent par conséquent un guide valable.

Conductivité (µS/cm2): caractéristique d'une eau permettant d'en déduire sa salinité. Cette mesure est utilisable en eau douce comme en eau de mer.
Densité (sans unité): correspond au poids de l'eau par rapport à celui de l'eau pure, dont la densité est de 1. Plus la densité est élevée, plus l'eau est riche en sel. Cette mesure n'est utilisée qu'en eau de mer, qui a une densité d'environ 1,023.
Dureté (en °f ou °d): rend compte de la teneur d'une eau en sels de calcium et de magnésium, les deux sels les plus courants dans les eaux douces. Plus la dureté est élevée, plus l'eau est dure (moins elle est douce).
pH (sans unité): détermine l'acidité ou la basicité d'une eau et doit être proche de 7 en eau douce et de 8 en eau de mer.
Salinité (en mg/I): mesure la concentration de tous les sels contenus dans l'eau, notamment de calcium, magnésium, sodium et potassium. Cette mesure remplace celle de la dureté dans le cas des eaux saumâtres ou marines; elle est équivalente dans le cas des eaux douces.

VALEURS GUIDES DE QUELQUES EAUX

t (°C)
pH
TH (°f)
c (µS/cm2)
Amérique du Sud
26
6,6
5
100
Amérique centrale
25
7,8
20
500
Fleuves africains
25
6,4
5
100
Lacs africains
26
8,5
10
300
Asie du Sud - Est
26
6,6
5
100
Mangroves
27
7,5
-
15000