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COMMENT NOURRIR LES ANÉMONES

par A. BREITENSTEIN (Extrait de la revue Aquarama - 1982)

L a symbiose, Amphiprion-actinie, est une curiosité de la nature. Pourquoi deux êtres si différents morphologiquement s'associent et vivent étroitement liés l'un à l'autre? L'association profite aux deux animaux; en captivité, le poisson nourrit son anémone et l'actinie (piège particulièrement urticant) protège son hôte nourricier. Dans leur biotope naturel, on rencontre des anémones seules mais très rarement d'Amphiprions sans anémone. On pourrait croire que l'association ne profite qu'a un seul individu. Pourtant, le poisson symbiotique joue un rôle important dans la survie, en captivité, de son anémone.

Vue d'ensemble du bac communautaire. Photo: A. Breitenstem

RÔLE DU POISSON COMMENSAL
COMMENSALISME: étymologiquement signifie qui mange à la même table. Ce terme s'applique parfaitement pour définir l'association qui lie poissons et anémones. Dans la nature, certains auteurs notent que les Amphiprions attirent de petites proies vers leurs pièges venimeux. En captivité, des poissons nourrissent leur anémone avec beaucoup d'assiduité et de constance.
Nous avons le plaisir d'élever une dizaine d'Amphiprions et une quantité équivalente d'actinies et un poisson plus particulièrement nourrit systématiquement son hôte. A chaque distribution de nourriture. notre Clarkii se précipite sur les morceaux de moules et s'empresse de les répartir parmi les tentacules de son anémone. Ainsi, deux fois par jour, il gave son actinie qui parfois est repue. Seul le Clarkii présente une telle activité au nourrissage, les autres poissons (Ocellaris, Dascyllus, Chromis), n'ont jamais développé une telle activité vis-à-vis de leur hôte. Le rôle du poisson commensal est très diversifié : chasse des prédateurs (plus particulièrement les Chaetodons qui se montrent très friands des tentacules), nettoyage de l'anémone après le rejet de la boulette, des dépôts entourant la sole pédieuse.

Les actinies préfèrent une eau agitée et bien aérée.


NOURRISSAGE DES ANÉMONES
Dans la nature les actinies ont un regime alimentaire essentiellement microphage, constitue de petites proies planctoniques ou plus rarement de petits poissons. En captivité, les anémones acceptent une grande variété d'aliments : moules crues ou cuites. Artémias adultes. crevettes. chair de poisson. et. d'une façon générale, tous les coquillages frais peuvent être distribues entiers ou hachés, crus ou cuits. Certaines grandes anémones (Stoichactis) absorbent aisément plusieurs moules entières crues ou cuites. En général il est préférable de donner des moules hachées qui sont mieux acceptées.

Gros plan des tentacules.


La distribution des Anémias représente un met de choix pour les poissons et les anémones. Je pense que ces minuscules crevettes sont indispensables pour assurer le nourrissage de nouvelles actinies qui ne sont pas encore habituées à recevoir une ou plusieurs moules décortiquées et cuites de surcroit Autre suggestion très bien acceptée : les tubifex, auxquels on ne pense pas toujours en eau de mer. Les vers peuvent être distribués sous forme de boulettes ou après agitation dans une fiole. Le nourrissage avec des Artémias ou des tubifex. n'est pas pratique (Courants très violents. turbulences créées par les diffuseurs) et l'on retrouve des Anémias ou des tubifex dans les filtres, ce qui n'est pas le but de la distribution ! Pour pallier cet Inconvénient. j'utilise un tube de PVC genre gaine d'électricien, de 50 cm de long environ. a l'extrémité duquel j'ai emboîté de force un petit entonnoir transparent. Lors des distributions d'Artémias destinées aux actinies. je dirige mon tube vers les tentacules d'une anémone et le remplis l'entonnoir avec un mélange d'Artémias et d'eau. De cette façon les actinies profitent au maximum de cette manne très appréciée. Les poissons sont maintenant parfaitement habitués et à chaque distribution de tubifex tout ce petit monde attend patiemment à l'embouchure du tube l'arrivée des premiers vers.

Tentacules blancs, ronds et très courts.


La distribution de particules plus volumineuses comme une moule entière ou une coquille saint-Jacques se lait à l'aide d'une longue pince qui peut atteindre toutes les anemones. De plus cette pince évite les (i morsures n de quelques poissons symbiotiques trop belliqueux. Ces morsures sont naturellement sans gravité. mais les plaies généralement profondes, peuvent saigner abondamment. La taille des aliments distribués aux actinies dépend évidemment de la dimension et de l'appétit de l'invertébré. Je pense qu'une actinie grande comme la paume d'une main (sans les doigts) peut absorber une distribution d'Artémias tous les deux jours, ou une moule entière tous les quatre jours Une actinie grande comme une paume de main, n'est pas très importante. mais cela représente une dimension moyenne que l'on retrouve couramment chez les revendeurs de poissons et invertébrés marins.

Actinie méditerranéenne.


FRÉQUENCE DES NOURRISSAGES
Tous les produits de la mer peuvent être distribués aux actinies, qu'ils soient crus ou cuits Il y a plusieurs façons de nourrir ces animaux en petites quantités et souvent. ou en plus grosses particules distribuées parcimonieusement. On peut. si la place le permet. élever d'importantes quantités d'Artémias adultes et nourrir tous les deux jours les anémones qui en raffolent. Selon la consistance du menu (moules ou chair de poisson) la fréquence des nourrissages est espacée. Pour ma part. j'opte pour un nourrissage plus fréquent, qui se rapproche le pense. du système naturel.

Commensalisme entre Amphiprion ocellaris et Radianthus.


La nourriture dispensée varie considérablement selon la taille et l'appétit des animaux Je possède une très belle anémone Slotchachs, qui dévore allégrement 4 à 5 moules entières tous les 5 jours! Il semble que les Rachanthus soient moins gourmandes et les indications fournies précédemment doivent ètre adaptées selon le genre d'invertébré Les anémones apprécient également les moules hachées en fins lambeaux. ou les oeufs de crevettes qui doivent représenter l'alimentation de base dans leur biotope naturel.

Commensalisme entre Amphiprion ocellaris et Radianthus.


La distribution de la nourriture se lait parmi les tentacules qui transportent ensuite les aliments jusqu'à l'orifice buccal. Seules les Radianthus ont le pouvoir de se refermer entièrement. Les Stoichacus absorbent leur nourriture complètement déployées. Les cnidoblastes des Stolchacils, beaucoup plus actifs que ceux des Rachanthus. retiennent mieux les particules alimentaires et les poissons ne peuvent pas reprendre une moule o collée " sur les tentacules d'une telle anémone. Selon les espèces, la durée d'absorption d'une moule varie de 2 à 10 mn. Malgré leurs tentacules très courts, les Sioichacbs absorbent rapidement les aliments et une moule prise dans les replis du disque est rapidement transportée jusqu'à l'orifice buccal. Les Rachanthus, qui possèdent de longs tentacules ont un mode d'absorption légèrement différent la moule déposee sur l'anémone disparais lentement parmi les tentacules. La déjection des déchets se déroule normalement 24 heures après l'ingestion sous la forme d'une boulette qui remonte rapidement à la surface de l'eau. Il est évidemment préférable de sortir cette boulette gluante avant que les poissons ne la déchiquetent !

Très belle Radianthus.


CONCLUSION
Les anemones sont des animaux relativement résistants si l'on prend soin de les nourrir convenablement Le nourrissage des invertébrés demande un peu de doigté et beaucoup d'observations. D'une manière générale il est souhaitable de nourrir peu mais souvent et régulièrement. Les invertébrés sont sensibles à toutes pollutions du milieu. ainsi qu'au renouvellement de l'oxygène contenu dans l'eau.
Les changements d'eau réguliers sont très appréciés. a condition que l'eau neuve soit préparée depuis quelques jours (parfaite dissolution des sels) et de bonne qualité. Lors des changements. il est nécessaire de vérifier l'équilibre des densités (bac et eau de réserve) les anémones étant particulièrement sensibles aux brusques variations de salinité. Il est souhaitable de remplacer peu d'eau mais souvent, environ un dixième du volume du bac par semaine. Avec des changements réguliers on évite les fluctuations de pH trop brutales et souvent préjudiciables aux animaux.

Sur cette photo on remarque les panicules alimentaires qui sont absorbées par l'anémone. Photos A Breistenstein.