 AROTHRON 
        CITRINELLUS
AROTHRON 
        CITRINELLUS
			
      par par Jean Jacques GIRAUDON et Jacques TETON (Aquarama - 1986)
        Les curieux et bien sympathiques poissons-ballons parfois capturés par 
        les jeunes indigènes de certains pays tropicaux, pour jouer au ballon, 
        finissent lamentablement leur existence sur les rivages desséchés. Heureusement 
        les aquariophiles de notre continent ne leur réservent pas ce triste sort, 
        bien au contraire ils s'ingénient à leur apporter tous les soins voulus 
        afin de leur fournir toutes les conditions nécessaires à une maintenance 
        optimale. 
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| Arothron citrinellus (subadulte). Photo : J. Teton | 
        APERÇU SYSTEMATIOUE
        Notre poisson appartient à l'Ordre des Tétraodontiformes, 
        au Sous-ordre des Tétraodontoidés, à la Famille des 
        Tétraodontidés, au Genre Arothron, et à l'espèce 
        citrinellus. Son nom scientifique est Arothron citrinellus 
        (Günther) 1870. Etymologie : Arothron = dépouvu de 
        narines, citrinellus = citrus (lat.) et citrull (lat.) 
        = citron = de couleur citron. Il a pour noms communs : Fr.: Poisson ballon 
        citron, Baudruche citron ; Angl.: Yellow Toadfish ; All. : Zitron Kugelfisch.
        REPARTITION GEOGRAPHIOUE-HABITAT
        A.citrinellus se répartit sur de nombreuses côtes 
        de l'Océan Pacifique et de l'Indo-Pacifique. Lors de nos plongées 
        aux Maldives nous l'avons rencontré sur les bords des tombants 
        qui marquent la limite entre le lagon et les eaux profondes. Lors de nos 
        observations à distance, nous avons remarqué qu'il effectuait 
        souvent des incursions en pleine eau, mais toujours à proximité 
        des parois du tombant, sur lesquelles il venait se réfugier à 
        la moindre alerte. Les eaux de son habitat sont très claires, fortement 
        brassées par la houle venant du large et consécutivement 
        très oxygénées.
        Les parois supérieures du tombant sont couvertes de Madrépores 
        (vivants et morts) et possèdent de nombreuses fissures, qui fournissent 
        dans l'ensemble d'excellents refuges à notre poisson handicapé 
        par sa couleur qui le met en évidence. Nous n'avons remarqué 
        aucune végétation marine dans son habitat, quoique les eaux 
        bénéficient d'un ensoleillement idéal. Nous avons 
        assez souvent rencontré A.citrinellus en solitaire, mais 
        parfois en groupe de quelques individus (adultes). La faune commensale 
        assez éclectique se compose des divers poissons inféodés 
        à ce type d'habitat, tels par exemple : Zanclus cornutus, 
        Forcipiger longirostris, Pomacanthus imperator, Pigoplites 
        diacanthus, Acanthurus leucosternon, Naso unicornis, 
        etc...
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| Arothron citrinellus (livrée juvénile) Photo : J. Teton | 
        COMPORTEMENTS
        Comportement interspécifique: En milieu naturel comme en aquarium 
        le comportement d'A.citrinellus est excellent à l'égard 
        des autres genres. En effet, notre poisson nage au milieu des autres pensionnaires 
        en affichant une attitude sereine, voire à la limite, méprisante. 
        En revanche, dans l'aquarium, qui est pour ainsi dire une cage de verre 
        où le poisson n'a guère de possibilité de fuite, 
        il faut éviter la présence de Labroides et autres poissons 
        déparasiteurs. Ces "nettoyeurs" par leur acharnement 
        à déparasiter le poisson, finissent par lui enlever des 
        morceaux de téguments et, causent ainsi des blessures qu'ils ne 
        cessent d'entrenir en les mordillant constamment.
        Comportement intraspécifique: En milieu naturel le comportement 
        d'A.citrinellus à l'égard de ses congénères 
        n'est pas très bien déterminé car le temps d'observation 
        par le plongeur est relativement réduit, de surcroît le poisson 
        dispose d'une aire immense et de nombreuses caches qui réduisent 
        les affrontements éventuels. Le fait d'avoir rencontré des 
        groupes de plusieurs individus militerait pour l'option d'un comportement 
        intraspécifique paisible. Cependant, deux A.citrinellus 
        adultes placés dans un aquarium (même spacieux) manifestent 
        un comportement intraspécifique plutôt mauvais. Ce phénomène 
        s'applique d'ailleurs à de nombreux autres genres de poissons car 
        la maintenance en aquarium bouleverse logiquement les règles de 
        comportements "naturels".
        Sachons aussi que les invertébrés et les petits poissons 
        ne peuvent pas cohabiter avec l'Arothron qui représente 
        un danger à leur endroit.
        Pour terminer ce chapitre sachons encore que l'Arothron est un 
        poisson facile à domestiquer. En effet, en usant de son appétit 
        insatiable il est rapidement conditionné par la nourriture distribuée 
        et, devient consécutivement "attaché" à 
        son propriétaire. Cette familiarité peut malheureusement 
        présenter parfois de douloureuses surprises car en raison de sa 
        gloutonnerie l'Arothron peut mordre profondément les doigts 
        de son soigneur. 
        DESCRIPTION
        A.citrinellus est un poisson au corps arrondi, d'une taille allant 
        jusqu'à 36 cm en milieu naturel et, jusqu'à 25 cm en aquarium 
        spacieux. Les nageoires qui sont toutes à rayons mous se réduisent 
        à une dorsale à l'aplomb de l'anale, servent à la 
        propulsion aidées par les pectorales toujours en mouvement. La 
        caudale, longue et arrondie, sert de gouvernail. La peau très coriace 
        est dépourvue d'écailles. La pigmentation du poisson change 
        avec l'âge du sujet. A l'état subadulte le poisson est brun 
        jaunâtre avec de nombreuses petites taches foncées éparses 
        et, une tache noire sur le dos. A l'état adulte le poisson perd 
        toutes ses taches et prend alors uniformément une couleur jaune 
        citron.
        La peau est couverte d'un mucus très épais. Le squelette 
        possède une faible ossification. L'orifice operculaire est restreint.
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| "Bec" d'un individu juvénile. La bouche est fermée mais le "bec" reste visible. Photo : J. Teton | 
        Les particularités propres à la famille des Tétraodontidés 
        à laquelle appartient A.citrinellus se caractérisent 
        par : 
        - des dents soudées en "bec" suturées au milieu 
        de chaque mâchoire. Ce bec se compose de deux pièces supérieures 
        et d'une seule pièce inférieure. Le bec repousse au fur 
        et à mesure de son usure et, caractérise bien un mangeur 
        de crustacés et de proies relativement solides. Le bec reste toujours 
        visible, même lorsque la bouche est close.
        - un sac stomacal capable d'emmagasiner de l'eau ou de l'air et, de produire 
        occasionnellement un gonflement important du poisson.
        ALIMENTATION
        Lors de nos observation in situ nous avons remarqué que 
        Arothron citrinellus "picorait" les squelettes de madrépores 
        et autres substrats, probablement dans le but de se nourrir de petits 
        crustacés et de gastéropodes peuplant ses supports. Ces 
        proies très dures offrent au poisson deux avantages :
        - elles ne sont pas véloces, donc faciles à capturer,
        - leurs structures très solides permettent au poisson "d'user" 
        ses dents. En aquarium sa nourriture sera partagée entre une distribution 
        de crevettes (vivantes ou congelées) et de chair de seiche (Sepia). 
        Cette restriction est d'ordre pratique et sanitaire. En effet, il est 
        souhaitable de choisir à la fois des nourritures à consistance 
        solide, riches en protéines et, qui ne polluent pas l'eau en se 
        désagrégeant.
        Nous prendrons garde à ne pas oublier de mettre à la disposition 
        de notre poisson des branches de coraux morts, afin que l'animal puisse 
        "user" ses dents, sinon il risquerait de chercher remède 
        en mordillant le décor ou tout ustensile plongé dans l'eau 
        de l'aquarium. 
        En conclusion de ce chapitre, signalons que A. citrinellus est 
        un poisson vorace qu'il faut nourrir plusieurs fois de la journée 
        en petites quantités. En bac d'ensemble son avidité le situe 
        en premier plan dans la compétition alimentaire, aussi est-il prudent 
        de nourrir en même temps et dans des endroits opposés, l'Arothron 
        et les autres pensionnaires, sinon ces derniers risquent d'être 
        sous-alimentés.
        Nourrir peu mais souvent, est une règle qui doit s'appliquer plus 
        que jamais pour ce poisson glouton.
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| Arothron citrinellus en milieu naturel (livrée adulte = sans tache) Photo : J. J. Giraudon | 
        MALADIE
        A.citrinellus est un poisson robuste qui dans de bonnes conditions 
        de maintenance est rarement malade. Une eau souvent renouvelée 
        (partiellement) contribuera avantageusement à un bon équilibre 
        physiologique du poisson et, consécutivement à sa résistance 
        aux attaques des ecto. et endoparasites communs dans les aquariums (voir 
        chapitre Maintenance). Nous pourrons également directement contribuer 
        à la préservation de sa santé en évitant les 
        manipulations répétées qui entraînent des érosions 
        de la peau avec pour conséquences des infections cutanées. 
        Parmi ces manipulations l'une des plus critiquables est celle qui consiste 
        à sortir le poisson de l'eau et de l'effrayer dans le but de le 
        voir se "gonfler". Dans ce cas, son diverticule gastrique (sac 
        stomacal) peut se remplir d'air (ou d'eau). L'air ainsi emmagasiné 
        est retenu par le sphincter pylorique et des sphincters oesophagiens. 
        Ce gonflement s'effectue par déglutition et l'évacuation 
        de l'air (ou de l'eau) par contraction des muscles abdominaux. Néanmoins 
        l'évacuation de l'air peut être bloquée par un choc 
        de frayeur et le poisson replongé dans l'eau peut malheureusement 
        flotter à la surface ventre en l'air pendant des heures, avec tous 
        les désagréments que cela engendre. Heureusement dans la 
        plupart des cas le poisson se dégonfle aussitôt et plonge 
        à nouveau.
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| Capture en milieu naturel (par J.J. Giraudon) d'un Arothron citrinellus subadulte. | 
        Dans le domaine de la toxologie il n'est pas superflu de signaler encore 
        que les Tétraodontidés deviennent toxiques avec l'âge. 
        Quoique nous n'ayons pas l'intention de manger notre Arothron sachons 
        cependant qu'il devient vénéneux en vieillissant. Le poison 
        qu'il secrète à partir de certains organes (glandes sexuelles, 
        vésicule biliaire et, tube digestif) est appelé Tetrodoxine 
        (*). Cette toxine est très dangereuse pour l'homme (ou l'animal) 
        qui ingère les organes de ces poissons.
        Notons encore que la longévité de Arothron citrinellus 
        peut aller jusqu'à environ 8 ans et parfois plus dans les grands 
        aquariums où règnent des conditions favorables.
        MAINTENANCE EN AQUARIUM
        Le bac destiné à A.citrinellus devra être assez 
        spacieux, c'est-à-dire d'une capacité d'environ 300 litres. 
        Si nous choisissons de le maintenir en compagnie d'autres genres de poissons 
        il serait souhaitable d'augmenter la capacité du bac en fonction 
        du nombre et des espèces en cohabitation.
        La décoration du bac peut être réalisée en 
        matériaux synthétiques expansés (Polystyrène, 
        Polyuréthane, etc...). Dans ce cas on aura soin de bien résiner 
        et sabler la surface du décor afin d'éviter que le poisson 
        décortique et avale des fragments de matériaux particulièrement 
        indigestes et dangereux.
        De nombreuses caches à la dimension du poisson seront aménagées. 
        Le décor sera complété avec quelques squelettes de 
        coraux branchus, tels par exemple : Acropora palmata, A.nobilis, 
        A.arcuata, Millepora alcicornis, Porites porites, 
        etc... (voir chapitre Alimentation).
        L'eau de mer synthétique doit faire l'objet d'une bonne préparation. 
        La densité de cette dernière se situera entre 1020 et 1025. 
        Quant au pH, il fluctuera entre 7,6 et 8,4. La température en milieu 
        naturel se situe entre 27 et 28° C, mais en aquarium nous vous suggérons 
        de la maintenir autour de 24°C. Cette différence, ou abaissement 
        de température de maintenance (si toutefois elle s'effectue progressivement) 
        permet notamment de mettre en application la théorie suivante : 
        Température en-dessous des données écologiques - 
        ralentissement du métabolisme du poisson - réduction de 
        l'appétit diminution de la quantité d'excréments 
        - retard de la pollution de l'eau.
        Tous nos efforts porteront sur le brassage de l'eau (turbulence et oxygénation) 
        et son renouvellement partiel et fréquent, seule méthode 
        efficace pour éliminer les nitrates. Notons à cet égard 
        que le goutte à goutte serait la panacée.
        L'éclairage du bac s'effectuera sur une durée de 12 h/jour 
        avec si possible une extinction et un allumage progressif de la lumière. 
        Quant à l'intensité de cette dernière, elle ne sera 
        guère importante puisque l'on ne peut pas envisager la culture 
        d'algues marines avec ce genre de poisson.
        REPRODUCTION
        A notre connaissance aucune reproduction complète n'a été 
        signalée en aquarium. En revanche, un article intitulé "Ponte 
        d'Arothron citrinellus GUNTHER en aquarium" a été rédigé 
        par J. MONTEL et B. CONDE dans l'ouvrage : La Pisciculture Française-Aquariologie 
        (réédition complète des textes de la Section Aquariophile-Aquariologie). 
        Dans cet article les auteurs sus-cités nous disent : "une 
        femelle fut acquise en décembre 1968, longue d'environ 18 cm, et 
        installée dans un bac de 200 litres. La première ponte fut 
        déposée en janvier 1972 et les autres lui succédèrent 
        à des intervalles d'environ 4 mois. Toutes ont eu lieu pendant 
        la nuit. Le volume d'une ponte est considérable, de l'ordre de 
        50 cm3 au moins. Une évaluation grossière, nous donne 98 
        000 oeufs pour 50 cm3".
| BIBLIOGRAPHIE DE GRAAF F. 1977. Encyclopédie des poissons d'aquarium marin. 344 p. Elsevier Séquoia, Paris-Bruxelles. GRASSE P.P. 1958. Traité de zoologie, Tome XIII. 2758 p. Masson, Paris. GRZIMEK B.1974. Le monde animal, Tome V. 495 p. Stauffacher S.A., Zurich. MONTEL J. et CONDE B.1974. La pisciculture française aquariologie. 607 p. Centre de documentation du Cercle Aquariophile de Nancy. | 
 (*) voir AQUARAMA N° 72/1983: LES ORGANISMES MARINS TOXIQUES ET 
        VENENEUX par t G. VALETTE. 
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