La réalisation
d'un bassin de plein air
Texte et photos : Marcel Staebler (revue Aquarama - 1997)
Un bassin de plein air, en dehors du plaisir qu'il nous apporte, est un lieu d'attraction pour de multiples insectes tels les libellules mais aussi de toute une faune aquatique. Voici quelques conseils pour sa réalisation.
![]() |
Les dimensions d'un bassin de plein air dépendent de la place disponible. Mais qu'il soit grand ou petit, le plaisir est toujours là. |
II faudra tout d'abord prévoir l'emplacement, selon le type de
bassin que l'on veut créer. On choisira une orientation au sud,
bien exposée au soleil, dans le cas d'un bassin à nénuphars,
au nord, dans une partie ombragée pour un bassin peupler de poissons
régionaux ou encore un compromis entre les deux selon les plantes
choisies. Nous vous proposons deux types de réalisations : un bassin
en béton avec coffrage ou sans coffrage ou un bassin avec une bâche
spéciale. Cette dernière solution est la plus simple et
peut-être la meilleure. C'est en tout cas la plus facile à
mettre en oeuvre. Les dimensions du bassin dépendent de la place
disponible. Il faudra prévoir un espace pour les plantes extérieures
qui jouent un rôle essentiel dans la beauté de l'ensemble
bassin et jardin. Grâce à elles, une microfaune s'installera
qui contribuera à maintenir le fragile équilibre du coin
de nature que l'on a créé artificiellement. Si pour une
raison ou une autre, on ne tient pas à mettre des plantes immergées,
il faudra installer une filtration pour garder l'eau propre et l'empêcher
de tourner.
![]() |
Bleus, rouges, jaunes, les nénuphars égayent la surface de l'eau de leurs couleurs vives. |
Que les travaux commencent
Il faut délimiter les contours du bassin avant de commencer à
creuser. Pour cela un tuyau d'arrosage fera parfaitement l'affaire si
on désire une forme naturelle. Pour une forme géométrique,
on trace le contour avec un cordon. Les bords du bassin seront moins profonds
que le centre pour pouvoir y faire pousser des plantes palustres. Il faut
impérativement prévoir plusieurs niveaux pour différentes
plantes mais aussi un endroit profond où les poissons pourront
se retirer à l'abri du gel et des grosses chaleurs. Le taux d'oxygène
contenu dans l'eau varie avec sa température : plus elle est chaude,
moins il y a d'oxygène dissous. Quand l'eau est déjà
très chaude lors d'une rapide dépression atmosphérique
due à un orage, le taux d'oxygène chute rapidement et les
poissons meurent par asphyxie. Une profondeur minimum de quatre-vingts
centimètres est conseillée.
Pour les bassins en béton, il faudra creuser plus profond car il
faut tenir compte de l'épaisseur de béton. N'oubliez pas
de placer une couche de gravier au fond avant de commencer à bétonner
et ne pas économiser le ciment. Un treillis en fil de fer le consolidera
et un hydrofuge le rendra étanche. Après que le béton
a séché, il faut l'enduire d'une couche de peinture spéciale
sinon il augmentera le pH de l'eau et la rendra alcaline, ce qui n'est
pas bon pour la croissance des nymphéas.
Pour les bassins réalisés avec une bâche plastique,
il faut enlever les pierres saillantes qui peuvent la déchirer.
Il vaut mieux acheter des bâches spéciales bassins que l'on
trouve dans beaucoup de jardineries. Elles existent en plusieurs épaisseurs
et sont très souvent traitées contre les rayons ultraviolets
qui modifient la structure des matières plastiques et accélèrent leur
vieillissement. Dès que le trou est fait, vous y posez la bâche et commencez
le remplissage en évitant les plis. Lorsque l'eau n'est pas encore trop
haute, vous pouvez mettre les plantes immergées ainsi que les nénuphars.
Une fois le bassin rempli, il faut enterrer les bords de façon
à cacher le plastique qui dépasse à l'extérieur.
Il vaut mieux ne pas y mettre d'écrevisses car la bâche ne
résiste pas longtemps à leurs travaux de terrassement.
![]() |
Le populage des marais, Caltha palustris, est du plus bel effet sur les bords d'un bassin dans la zone humide. |
Quelles plantes selon les zones
Pour les bords du bassin, là où la terre n'est pas humide,
toutes les plantes aimant la lumière conviennent car la réverbération
du soleil sur l'eau augmente la luminosité ambiante. Pour la zone
humide appelée aussi paludarium, il faut des plantes adaptées
à ce milieu. Des populages des marais (Caltha palustris),
des trolles (Trolius europaeus), des plantains d'eau (Alisma
plantago) qui peuvent toutefois devenir envahissants, des joncs fleuris
(Butomus umbellatus), de la menthe aqua tique (Mentha aquatica)
qui d'après certains aurait des pouvoirs bactéricides sur
l'eau du bassin, des myosotis des marais (Myosotis palustris) des
iris jaunes (Iris pseudacorus), ainsi que la salicaire (Lythrum
salicaria), qui elle pousse partout même dans les sols secs.
Il ne faut pas oublier le calla des marais (Calla palustris), ni
l'herbe aux écus (Lysimachia nummularia), le trèfle
d'eau (Menyanthes trifloliata) ainsi que la mimule (Mimulus
species). Comme vous le voyez le choix est vaste et si vous n'avez
pas peur d'être envahi, ou si le terrain est assez grand, vous pouvez
planter des roseaux communs (Phragmites communis) mais attention
ils drageonnent. Des massettes à larges feuilles (Thypha latifolia)
font aussi l'affaire mais elles aussi deviennent envahissantes. Il faudra
éviter de faire des poches d'eau qui ne sont pas reliées
au bassin, car si les poissons ne peuvent pas les atteindre, les moustiques
viendront y pondre.
![]() |
Hemerocallis, le lis d'un jour, à fleurs jaunes ou orangées, est aussi un bon choix. |
Pour la zone plus profonde, à partir de quarante centimètres,
les nymphéas aux vives couleurs seront les vedettes. Il en existe
de nombreuses variétés dont les premiers spécimens
rouges ont été créés par Monsieur Bory Latour
Marliac dans le sud-ouest de la France. Il y a bien sûr le nénuphar
jaune (Nuphar luteum) niais aussi la macre ou châtaigne d'eau
(Trapa natans). Des nénuphars exotiques bleus par exemple
conviennent pour les régions où il ne gèle pas.
![]() |
Souvent leurs fleurs dépassent de quelques centimètres de la surface de l'eau, ce qui leur donne un air majestueux. Les jacinthes d'eau (Eichhornia crassipes) non plus ne supportent pas le gel mais elles sont magnifiques dans les bassins méditerranéens. Les pistias que l'on trouve parfois dans les jardineries permettent de couvrir la surface pour faire de l'ombre aux poissons mais seulement dans les régions aux hivers doux. Les lotus conviennent aussi pour les bassins où il ne gèle jamais, ou alors il faut les garder au chaud l'hiver dans une cave par exemple. Les élodées (Elodea canadensis), les hippuries (Hippuris vulgaris), les myriophylles (Myriophyllum verticilatum) ainsi que la forme immergée de la flèche d'eau (Sagittaria sagittifolia) serviront de plantes oxygénantes. La flèche d'eau pousse aussi dans la zone humide. C'est d'ailleurs là qu'elle prend la forme typique de flèche d'eau, car sous l'eau elle ne déploie que de longues lanières comme des rubans. |
Et pourquoi pas l'Acore, Acorus calamus, qui nous vient d'Asie Mineure ? |
La Vallisneria gigantea elle aussi est pourvue de longues lanières
et convient très bien aux bassins de plein air mais ses racines doivent
être à l'abri du gel.
Vous n'aurez que l'embarras du choix car il est bien sûr difficile
de mettre toutes les plantes citées. Les plantations personnalisent
les bassins et chacun a des goûts différents. Pour les aménagements,
il faut donc laisser ses talents s'exprimer, c'est pour cette raison qu'il
n'y a jamais deux bassins pareils.
![]() |
Un bassin attire les amphibiens. Ici, Rana esculenta, une grenouille verte. |
Poissons dedans grenouilles autour
Pour les poissons, vous avez bien sûr le choix entre les poissons
rouges (Carassius auratus) mais aussi les koïs. Pour les bassins
du sud de la France où le temps est plus clément, les gambusies
(Gambusia affinis) seront d'excellents dévoreurs de larves
de moustiques. Ils sont d'ailleurs courants en Camargue où ils
limitent la prolifération des moustiques. Des guppys (Poecilia
reticulata) feront aussi l'affaire.
Plus tard des grenouilles vertes (Pana esculenta) viendront peut
être coloniser votre bassin. Vous pourrez apercevoir d'autres amphibiens
comme par exemple la grenouille rousse (Rana temporaria) qui viendra
certainement au printemps pour y pondre ses oeufs. Il faudra prévoir
un endroit où les gros poissons ne pourront pas les dévorer.
Une cascade permettra non seulement de multiplier le nombre des plantes
des bords mais aussi d'isoler une ponte de batraciens qui sont venus profiter
de l'eau pour s'accoupler. Les pompes immergées sont idéales
pour remonter l'eau. Elles sont actuellement très performantes
pour un prix raisonnable. Pour économiser sur la facture d'électricité,
on peut y rajouter une minuterie que l'on règle pour que la pompe
marche uniquement lorsque l'on est présent.
![]() |
Rana temporaria, la grenouille rousse, peut choisir votre bassin comme lieu de ponte. Prévoyez un endroit à cet effet. |
Un peu d'entretien beaucoup de plaisir
L'entretien d'un bassin se limite au strict minimum. Tous les cinq ou
six ans, il faut le vider, enlever les plantes excédentaires, en
particulier les nénuphars et une grande partie de la boue qui s'est
déposée au fond. Si vous avez des amis qui veulent installer
un bassin, ils pourront à cette occasion récupérer
quelques plantes. En fait un bassin donne moins de travail que la même
surface de gazon et dix fois plus de satisfaction. N'hésitez plus,
les efforts faits pour l'installation seront très largement récompensés
par la beauté de la réalisation. Avec peu de place disponible,
on arrive à faire de très belles réalisations.