HISTOIRE D'O
par Renaud LAVIGNE. (Revue Aquarama, 1989)
Que les lecteurs qui ont phantasmé à la vue de ce titre
ne soient pas trop déçus!
Pourquoi un tel intitulé ? . . . Aucune idée ? . . . Allez
! Je vous dévoile le sous-titre: "CHANGEZ L'EAU"
Dans la nature l'eau est renouvelée par évaporation et précipitation. Photo: D. Vogt |
POURQUOI CHANGER L'EAU?
1-La nature ...
Dans la nature, l'eau est constamment renouvelée par le biais du
cycle d'évaporation - précipitation. Les modifications du
milieu aquatique qui s'ensuivent sont parfois colossales, à l'instar
du cas d'un fleuve en crue: imaginez que, chaque seconde, l'Amazone en
crue déverse 200 millions de litres d'eau dans l'océan!
Avec les eaux vives (ou courantes), le milieu est donc incessamment transformé
et l'apport important et permanent d'eau "neuve" le rendre lui-même
"rénové".
Avec les eaux dormantes (ou stagnantes), telles une simple mare ou un
lac, le milieu est au contraire très lentement modifié et
l'eau, pratiquement non régénérée, vieillira
petit à petit.
Dans tous les cas cependant, la situation pour le poisson est approximativement
la même: s'il vit dans les eaux courantes, il est habitué
à une certaine qualité de l'eau et celle-ci ne varie presque
pas puisque l'eau salie (par les déjections, les détritus
. . .) est emportée plus en aval et remplacée par de l'eau
plus propre venue d'amont. L'on aboutit alors à la situation paradoxale
qui est que ce perpétuel renouvellement de l'eau contribue à
la stabilité du milieu.
Si le poisson peuple un étang, il est accoutumé aux caractéristiques
de son eau mais celle-ci n'est que faiblement recyclée et le maintien
de sa qualité est difficilement possible. L'accumulation de déchets
et de leurs produits de dégradation rend le biotope (milieu) de
plus en plus pollué, de sorte que la biocénose (les êtres
vivants qui le peuplent) sera modifiée: apparaîtront ou survivront
les espèces les plus adaptées ou résistantes jusqu'au
stade inéluctable ou aucune espèce aquatique supérieure
ne pourra supporter d'y vivre. Mais revenons à notre poisson: à
son échelle, le milieu sera pratiquement constant, tant son grand
volume rend les variations lentes.
2- ... et l'aquarium:
Dans les aquariums, il en va tout autrement: l'eau devient vieille c'est-à-dire
chargée en éléments minéraux et organiques,
bien plus vite car la densité en organismes vivants y est beaucoup
plus élevée. Ceux-ci modifient les qualités de l'eau
par le truchement de divers processus biochimiques et l'eau qui vieillit
diffère de plus en plus de l'eau originelle, tant par ses qualités
physiques (turbidité, couleur . ..), que par ses qualités
chimiques (pH, TH, teneur en nitrates . ..) ou biochimiques (matières
organiques telles les protéines ou les toxines).
A ce propos, rappelons que l'eau neuve (ou fraîche) est de l'eau
pure peu altérée, qui permet donc d'entretenir aisément
la vie, l'eau vieillie est de l'eau neuve que l'on a stockée et éventuellement
condi tionnée (dégazée, oxygénée, filtrée . . .) en vue d'une utilisation
ultérieure, tandis que l'eau vieille (ou usagée) est de l'eau aux qualités
dégradées, comme c'est le cas de l'eau d'un aquarium anciennement aménagé
ou de l'eau d'un étang au bout de plusieurs années.
L'eau vieillit malgré l'utilisation de filtres car ceux-ci ne font que
la nettoyer, retardant l'utilité d'un renouvellement mais n'en éliminant
pas la nécessité. Les filtres parfaits existent: on les alimente avec
de l'eau polluée et on récupère de l'eau pure. Cela peut être réalisé
par osmose inverse. Cependant, ce type de filtres n'est pas idéal car
l'eau obtenue est impropre à maintenir la vie puisque dénuée, non seulement
de tous les composés réputés polluants, mais également de tous les autres
éléments, utiles, eux! Le filtre idéal serait celui qui éliminerait sélectivement
de l'eau la quantité idoine de tel ou tel produit qui y serait en concentration
supérieure à celle du départ. Mais c'est parfaitement utopique pour de
nombreuses décennies encore, pour la bonne et simple raison qu'aucun chimiste
au monde n'est capable, à l'heure actuelle, de vous dire tout ce que renferme
une eau telle celle d'un aquarium, et, a fortiori, d'en doser les constituants!
L'eau vieillit donc, par la force des choses; plus ou moins rapidement
néanmoins, selon les conditions biologiques (biomasse . . .) et techniques
(filtration .. .) du milieu, ainsi que l'entretien de l'aquarium (nourrissage,
siphonnages, changements d'eau . . .). Mais cette dégradation interviendra
que votre eau soit à l'origine de l'eau de pluie, de l'eau de rivière,
de l'eau de conduite ou de l'eau synthétique!
Cette dégradation des qualités de l'eau conduit à deux phénomènes apparemment
contradictoires puisqu'opposés: une pollution (par accumulation de certains
éléments) et des carences (par disparition de certains autres).
Dans les eaux
dormantes ou stagnantes le milieu s'enrichit en nitrates de différentes
manières auxquelles contribuent par exemple les oiseaux aquatiques. Photo: D. Vogt |
La pollution se manifeste essentiellement, par l'apparition de produits
de dégradation des molécules organiques. Tous les excédents de nourriture,
les débris végétaux, les excréments, les urines, les cadavres, etc., seront
transformés par les bactéries pour générer de l'ammoniac, puis des nitrites
et enfin des nitrates. La teneur de ceux-ci ne va cesser de s'accroître
régulièrement, presque indéfiniment. Ceux-ci sont bien moins toxiques
que les nitrites, quelque 500 fois moins, et des poissons progressivement
accoutumés peuvent tolérer de vivre dans une eau en renfermant plusieurs
centaines de milligrammes par litre. De plus, ils sont utiles aux plantes
pour lesquels ils constituent un engrais, de sorte qu'il n'y a, a priori,
que peu de raisons de s'en inquiéter. En fait si, car, premièrement, il
n'y a jamais assez de plantes dans un aquarium moyennement peuplé pour
tous les absorber; ensuite, parce que c'est un facteur de prolifération
des algues; enfin, parce que des variations des conditions physico-chimiques
du milieu peuvent amener les nitrates à subir une réduction qui les transformerait
en nitrites, voire ammoniac (encore plus toxique), ce qui conduirait à
la mort foudroyante de tous les animaux aquatiques.
Les carences résulteront du non-remplacement des oligo-éléments.
Ceux-ci, éléments présents en faibles quantités
mais indispensables à la vie, tels le cobalt, le cuivre, le fer
ou le manganèse, seront utilisés par les organismes vivants
jusqu'à leur épuisement. Le filtre, de même qu'il
ne supprime pas les nitrates, ne régénérera pas les
oligo-éléments! Ces carences toucheront aussi bien les végétaux
(chlorose .. .) que les animaux (anémie . . .)
Afin de pallier ce double problème, la solution la plus simple
et la plus efficace consiste donc à changer régulièrement
tout ou partie de l'eau viciée. La concentration des composés
polluants diminuera par effet de dilution, tandis que de nouveaux oligo-éléments
seront apportés par ce moyen. L'action serait plus efficace encore
si l'on prend soin de siphonner par la même occasion une partie
des déchets qui jonchent le sol. On baisse ainsi la quantité
de matières organiques, ce qui ralentit l'accumulation des nitrates;
l'on diminue donc égalment la D.B.O. (qui représente la
quantité d'oxygène nécessaire aux bactéries
pour qu'elles dégradent la matière organique) puisqu'il
y aurait moins de déchets à décomposer; d'où
une diminution du risque de réduction des nitrates! En outre, le
renouvellement d'eau contribue à la stabilisation des conditions
du milieu, puisqu'il contrarie une détérioration incessante,
ce qui limite les fluctuations propices à induire la réduction
des nitrates: par exemple, si le pH s'accroît, le taux de nitrates
décroît au détriment du taux d'ammoniac.
Certains aquariophiles recommandent de ne jamais changer l'eau, qui, soit-disant,
acquiérait une immunité (on se demande bien laquelle!) et
à laquelle des poissons sont habitués. Ce second point est
vrai, mais l'on tend inéluctablement à faire périr
tous les poissons car il faut bien avoir conscience qu'ils ne résisteront
pas indéfiniment à l'augmentation de pollution. Un jour
ou l'autre, il faudra se résoudre à changer l'eau, et ce
jour-là, justement parce qu'ils seront accoutumés à
des conditions très différentes, ils risquent de ne pas
se remettre d'un renouvellement qui normalement aurait été
salutaire et qui, ici, est trop brutal.
QUAND CHANGER L'EAU?
Quand? Pas trop tôt, si des raisons d'économie (eau de mer
. . .) ou de commodité interviennent; mais pas trop tard, nous
venons de le voir, car il ne faut pas mettre en danger la vie des poissons,
auquel cas, l'économie réalisée (devant laquelle
la majorité des aquariophiles privilégieront, je l'espère,
d'autres critères . . .) serait bien faible! Certes, mais cela
reste peu précis!
Disons que la plupart s'accordent pour reconnaître une concentration
de quelque 100 mg/I de nitrates comme limite supérieure. Ce chiffre
devrait préférentiellement être abaissé en aquariophilie
marine, spécialement avec des invertébrés, mais pourrait être légèrement
dépassé en eau douce. La fourchette 50 à 200 mg/I constitue le garde-fou
de l'aquariophile.
Le meilleur moyen est donc d'analyser les nitrates, puisque ceux-ci sont
un excellent marqueur de la pollution, et dès la valeur atteinte, de procéder
à un renouvellement d'eau. Cependant, cela suppose des analyses relativement
fréquentes, analyses qui sont onéreuses sinon délicates (3).
Il conviendrait donc de prévoir l'évolution de la concentration en nitrates
à long terme, afin d'effectuer des changements d'eau adéquats, de la façon
la moins traumatisante possible. Evaluer la fréquence et l'importance
des renouvellements d'eau est une entreprise délicate, fort sujette à
caution. Certains auteurs prodiguent des conseils en ce sens tel que de
renouveler 1/10 à 1/4 de l'eau chaque semaine (1) ou 1/5 à 1/4 de l'eau
par mois (5). Cependant, ces personnes se basent sur leur propre (et précieuse)
expérience et les résultats ne seront pas forcément adaptés à tout autre
aquarium, puisque difficilement extrapolables. Même deux bacs strictement
identiques au début (volume, appareillage, population . . .) pourront
avoir des destinées divergentes si leur possesseur ne les entretient pas
de la même manière (nourrissage des poissons, bouturage des plantes, siphonnage
des déchets, traitements médicamenteux . . .). Les recommandations sus-citées,
pour intéressantes qu'elles soient, ne sont donc pas à suivre au pied
de la lettre.
Des exemples qui vont suivrent me permettront d'ailleurs mon propos et
de prouver que des renouvellements d'eau de cette importance peuvent être
néfastes pour les hôtes de l'aquarium (tout en étant préférable au fait
de ne rien faire!)
Abaque permettant de connaître le volume d'eau à renouveler et la fréquence des changements en fonction de la longueur totale des poissons. Ainsi, pour 20 poissons de 5 cm (L=1 m), on peut changer 100 I/semaine; si on ne veut pas dépasser 50 litres, on devra changer l'eau tous les 3 jours au moins (par exemple 15 l/j) etc. |
COMMENT CHANGER L'EAU?
Un intéressant article présentait une formule autorisant le calcul
de la teneur maximale d'un élément dans une eau en fonction de divers
paramètres (4). Les aquariophiles ayant lu l'article ont pu être surpris
d'apprendre que c'était possible et que la concentration ne dépassait
pas une certaine valeur. Les lecteurs mathématiciens auront reconnu une
propriété banale de certaines séries.
L'auteur ne donnait pourtant aucune indication susceptible d'effectuer
le meilleur choix possible (fréquence, proportion) et il renvoyait aux
dosages pour déterminer la valeur moyenne de l'augmentation des nitrates.
Le principe est simple et indiscutable: vous mesurez la teneur en nitrates
(C 1) et réitérez l'opération quelques jours après (C 2); l'augmentation
journalière est alors:
(C 2 - C 1)/(t 2 - t 1)
(t 2 - t 1) étant le nombre de jours séparant les deux analyses. Il faut
néanmoins attendre quelque trois semaines après que le bac ait été aménagé,
de façon que le cycle de la nitrification soit stabilisé (3). De plus,
il faut doser les nitrates et il est par conséquent aussi simple de se
servir de ce renseignement pour évaluer directement si le renouvellement
se justifie (c'est-à-dire si la teneur oscille entre 50 et 200 mg/l) ou
non. De sorte que l'intérêt de l'article devenait purement informationnel
puisqu'il n'avait guère d'utilité pratique ...
C'est la raison pour laquelle j'ai été amené à entreprendre une série
d'expériences et à modéliser sur ordinateur les effets des changements
d'eau. En voici les plus importants résultats:
1- Accumulation des nitrates:
L'origine principale des nitrates étant la décomposition
de la matière organique, leur augmentation est proportionnelle
à la biomasse. D'autre part, elle est plus élevée
en eau de mer car les végétaux, moins nombreux, en assimilent
une proportion négligeable (d'où la nécessité
d'installer un écumeur)
que cet accroissement avoisinait 15 mg par jour et par cm de poisson d'eau
douce, et 25 mg par jour et par cm de poisson marin. D'après le
nombre et la taille de ses poissons, on est donc en mesure d'approximer
la vitesse d'accumulation des nitrates, qui est:
A = 15 (ou 25) x L / V (en mg/l/j)
où L est la longueur totale des poissons (en cm), V est le volume
net de l'aquarium (en I).
Ex.: aquarium d'eau douce de 200 I contenant 10 scalaires de 7 cm, 20
néons de 4 cm et 2 corydoras de 5 cm: L = (10 x 7) + (20 x 4) +
(2 x 5) = 160 cm, d'où A = 15 x 160/200 = 12 mg/l/j. Chaque jour,
la teneur en nitrates augmentera d'environ 12 mg/I, ce qui signifie qu'au
bout d'un mois, si aucun changement n'a été effectué,
la concentration avoisinera 360 mg/1.
2- Fréquence minimale de renouvellement d'eau:
Se basant sur une teneur limite de 100 mg/I, la période maximale séparant
chaque changement d'eau serait:
T = 100/A (en j)
Ex.: Si A = 12 mg/I, alors T = 100/12 = 8 j. Pratiquement, cela signifie
que l'on devra changer l'eau au moins chaque semaine. Ainsi, la limite
de 100 mg/I ne serait pas dépassée. Ce cas est un extrême au cours duquel
on change la totalité de l'eau. C'est sans nul doute efficace mais il
y a d'autres possibilités, moins stressantes pour les habitants de l'aquarium.
Fig. 1: cet exemple permet de visualiser l'incidence des changements d'eau sur la qualité du milieu (cf. texte). |
3- Influence de la proportion sur la fréquence de renouvellement d'eau:
Si l'on peut pratiquer l'opération plus fréquemment, le volume d'eau changée
pourra être moindre et valoir:
Q = A x T x V / 100 (en l)
Ex.: Si A = 12 mg/l/j et V = 200 I; si on veut changer l'eau chaque mois
(T = 30 j), on calcule:
Q = 12 x 30 x 200/100 = 720 l, ce qui est impossible! Cela est normal
puisque la période minimale à respecter est de 8 j. Si l'on change l'eau
chaque semaine (T = 7 j), alors:
Q = 12 x 7 x 200/100 = 170 I ;
Si l'on change l'eau chaque jour (T = 1 j), alors:
Q = 12 x 1 x 200/100 = 24 l, etc.
Ici, le plus commode serait donc de changer environ 25 I d'eau chaque
jour car 170 I par semaine serait encore trop brutal pour les poissons
et une fréquence intermédiaire, telle que tous les 2 jours, n'est pas
pratique (notre vie est rythmée essentiellement par le nycthémère, la
semaine et, moindrement, le mois, périodes qu'il est donc très facile
de respecter)
A la limite, une très faible partie de l'eau est remplacée très souvent:
c'est le procédé du goutte à goutte.
4- Le goutte à goutte:
A ma connaissance, jamais cette pratique n'a été quantifiée.
Bien sûr, le procédé consiste à changer l'eau
sans discontinuer, goutte par goutte. Mais quelle doit en être la
fréquence? La formule qui suit permet de connaître le nombre
minimal de gouttes qui doivent être renouvelées chaque minute:
N = A x V/10 (gouttes par min.)
où A est l'augmentation de nitrates en mg/l/j et V le volume de l'aquarium
en l.
Ex.: Si A = 12 mg/l/j et V = 200 I, alors N = 12 x 200/10 = 240 gouttes/min.
On devra donc assurer un débit minimal de 4 gouttes par seconde
pour ne jamais dépasser une concentration d'environ 100 mg/l de
nitrates (Nota: une goutte moyenne représente environ 0,070 ml).
Concernant l'aspect technique du problème, à savoir: comment
équiper son bac d'un montage ad hoc, je renvoie le lecteur à
l'article de L. Franck (2). Précisons que ce procédé
est évidemment valable pour l'eau de mer, mais comme nos conduites
d'adduction ne distribuent pas d'eau de cette qualité, il sera
nécessaire de prévoir un réservoir et de l'alimenter
en conséquence ...
Fig. 2: différentes façons de changer l'eau ont une influence sur la concentration en nitrates (cf. texte). |
5- Effets des changements d'eau
Ce tour d'horizon fini, voici un exemple illustré qui permettra
de visualiser l'incidence des changements d'eau sur la qualité
du milieu à long terme (figure 1). L'aquarium fait 200 l et l'accroîssement
en nitrates a été fixé a 5 mg/l/j.
L'extrême serait de ne jamais changer d'eau. Dans ce cas, la concentration
ne cesserait de s'accroître pour atteindre 50 mg/I après
10 jours, 150 mg/I après un mois, 900 mg/I au bout de six mois,
etc. (courbe A). Si l'on change 10 % (Vo) de l'eau chaque quinzaine, la
concentration de nitrates se stabilise lentement vers la valeur élevée
de 750 mg/I (courbe B). Si on renouvelle 75 % de l'eau chaque quinzaine,
la teneur en nitrates tendra rapidement vers une limite plus faible de
100 mg/I (courbe C).
Ce graphique illustre donc parfaitement le fait que, plus le changement
d'eau est important, plus le degré de pollution à long terme
sera faible.
Maintenant, toujours avec ce même exemple, voyons l'influence qu'ont
différentes façons de changer l'eau, la concentration en
nitrates à long terme étant dans chaque cas la même
(figure 2). Trois cas ont été modelisés: 5 % d'eau
changés par jour (courbe A), 25 % d'eau changés tous les
5 jours (courbe B) et 70 % d'eau changés toutes les 2 semaines
(courbe C).
Si toutes les courbes convergent vers la même valeur (100 mg/l),
les variations sont très diverses: elles sont minimes dans le premier
cas, plus fortes dans le cas intermédiaire et très importantes
dans le dernier puisque la concentration oscille entre 30 et 105 mg/I
après un mois. Chaque changement d'eau incommodera donc beaucoup
les poissons car la variation sera non seulement brusque mais très
importante.
Ce second graphique est tout à fait corrélable avec ce qui
a été exposé dans le troisième paragraphe
de ce chapître: on peut atteindre un même but de diverses
façons, mais certaines sont nettement plus recommandables que d'autres.
L'effet à long terme d'un goutte à goutte serait le même
que celui d'un changement de 70 % tous les 14 jours, mais les modifications
du milieu seraient très progressives dans le premier cas, pratiquement
imperceptibles, tandis qu'elles seraient difficilement supportables dans
le second. Si le renouvellement de l'eau est indispensable et permet de
limiter la teneur des polluants, il existe donc une infinité de
manières possibles de changer l'eau pour parvenir à un résultat
similaire à long terme, depuis le goutte à goutte jusqu'au
remplacement régulier de la totalité de l'eau. Selon la
proportion choisie, le milieu sera plus ou moins perturbé, ce qui
pourra porter préjudice aux organismes aquatiques.
CONCLUSION:
Les renouvellements d'eau sont très bénéfiques car
permettent l'apport d'éléments en voie d'épuisement
et l'élimination d'éléments toxiques qui accumulent.
Ils sont d'autant plus efficaces que leur fréquence est élevée
(c'est-à-dire que l'on change souvent l'eau) et que leur importance
est grande (c'est-à-dire que l'on change une forte proportion d'eau).
Cependant, cette dernière solution n'est pas la meilleure puisqu'elle
engendre un stress pour les êtres vivants, stress qui résulte
d'une modification brutale et forte du milieu. Par conséquent,
il avère que le meilleur moyen de procéder consiste à
renouveler souvent une faible proportion d'eau, l'idéal étant
le goutte à goutte. L'action bénéfique sera identique,
mais le choc que subiraient les hôtes de nos aquariums sera de la
sorte évité.
BIBLIOGRAPHIE:
(1) CRUSIO, W. E., "L'écologie dans votre aquarium",
Aquarama, 1978, 43: 17-21
(2) FRANCK, L., "Le goutte à goutte", Aquarama, 1987,
97: 50-53
(3) LAVIGNE, R., "Les nitrates en aquarium", Aquarama, 1988,
104: 55-61