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Le Lux à petit prix.
Souhaités ou dangereux ?

Texte et photos : Renaud Lavigne. (Revue Aquarama, 1997)
L'idéal pour mesurer la lumière est de recourir au luxmètre, instrument de mesure de l'éclairement qui s'exprime en lux. Mais cet appareil sophistiqué est relativement onéreux. Grâce à un appareil photographique, on peut facilement réaliser la même opération.

Une Cryptocoryne peut se satisfaire d'une centaine de lux.


Tout aquariophile possède un thermomètre car il ne viendrait l'idée à personne de contrôler la température de l'eau en y trempant le doigt, si ce n'est lors de changement de faible volume. Pour ce qui est de la lumière, il est tout aussi aléatoire de se fier à notre sens qu'est la vue. Quant au calcul, même pour qui en connaît un rayon, il est suffisamment laborieux pour ne pas avoir envie de l'entreprendre.
Ce que plante veut
Pourquoi devons-nous contrôler l'intensité lumineuse ? Tout simplement parce que le mesurage donne un résultat objectif - la mesure - qui seul autorise les comparaisons fiables et, s'il y a lieu, les corrections ad hoc.
La lumière est, en effet, indispensable aux végétaux supérieurs (les champignons n'en ont pas besoin), à l'instar du gaz carbonique (CO2), de l'eau et des sels minéraux. D'un point de vue qualitatif, les rayonnements bleus et rouges sont les plus efficaces pour l'activité photosynthétique. On dispose actuellement de sources lumineuses fort bien équilibrées, telles le Grolux ou le Fluora. L'aspect quantitatif, quant à lui, est plus difficile à appréhender : entre un clair de lune (moins d'un lux) et le plein soleil zénithal en zone équatoriale (plus de cent mille lux), on convient qu'il y a de la marge ! Doit-on assurer un éclairement de dix lux, de cent lux, de mille lux ou de dix mille lux ?
Les expériences tendent à prouver que les processus biochimiques végétaux sont saturés au-delà de vingt mille à trente mille lux pour les plantes héliophiles (de soleil). Il n'est donc pas nécessaire de les éclairer avec plus de vingt mille lux, si ce n'est pour renflouer les caisses de votre distributeur d'électricité ! Pour les plantes sciaphiles (d'ombre), cette limite peut apparaître dès quelques milliers de lux. Les mesures obtenues dans la nature montrent aussi que les végétaux aquatiques disposent rarement de plus de quelques centaines ou milliers de lux. Tout simplement parce que les conditions astronomiques (date), météorologiques (nébulosité), hydrologiques (turbidité) ou écologiques (ombre) ne sont pas toujours optimales.
Ainsi en aquarium, les espèces immergées qui sont moins exigeantes se contentent d'un millier de lux (entre cent et deux mille cinq cents). En effet, en raison de phénomènes physiques incontournables tels l'absorption, la diffusion, etc., l'éclairement s'affaiblit rapidement avec la profondeur (cf. "Réflexions", Aquarama n° 115 p. 36). Les plantes feuilles flottantes, Ceratopteris, Eichhornia, Lemna, Pistia, Riccia, Salvinia..., requièrent, elles, deux mille à trois mille cinq cents lux (cf. "L'éclairage des aquariums ?" Kubler R., TFH - 1980)

Une Rotala nécessite plus de mille lux pour conserver sa belle couleur. .


Que la lumière soit
On peut donc retenir que le chiffre de mille cinq cents lux est satisfaisant pour une population hétérogène de végétaux aquatiques.
Pour vérifier si cette valeur est atteinte, le luxmètre est parfait mais nous sommes peu nombreux à en posséder. Par contre, beaucoup disposent d'un appareil photographique muni d'une cellule photoélectrique pouvant en faire office. Ainsi, sans investissement, nous voici en mesure (c'est le cas de le dire) de réaliser à peu de choses près la même opération.
Pour ce faire, il suffit de pointer son appareil photo muni de son optique de focale standard, 50 mm pour un 35 mm, vers l'endroit voulu et de lire l'ensemble des paramètres correspondant à une exposition idéale : ouverture du diaphragme, sensibilité du film et vitesse d'obturation. De cette manière, on mesure l'intensité de la lumière réfléchie qui est dépendante du pouvoir réflecteur de l'objet visé : très faible pour de l'ardoise, très élevé pour du sable de Fontainebleau.
La mesure représentative de ce que reçoit la plante implique de connaître non l'intensité réfléchie, mais l'intensité incidente i.e., le rayonnement frappant le point considéré. Il faut alors pour cela utiliser un miroir (quelque 99 % de réflexion), indispensable aussi avec un luxmètre, ou, à défaut, une plaque de matière plastique ou de céramique blanche (cf. schéma).

Mesure de l'éclairement au moyen d'un miroir et d'un appareil photographique.


On calcule ensuite très facilement l'éclairement grâce à la formule suivante : E (lux) = 100 f/s/t
f est l'ouverture du diaphragme (... 1,4, 2, 2,8... 22, 32...)
s est la sensibilité de la pellicule en ISO (... 25, 50, 100...1600, 3200...)
t est la vitesse d'obturation en s (... 1, 1/2, 1/4... 1/500, 1/1000...) Exemples :
si f = 2, s = 100 ISO, t = 1/250 alors E = (2x250) 500 lux
si f = 2, s = 100 ISO, t = 1/15 alors E = (2x15) 30 lux
si f = 4, s = 25 ISO, t = 1/60 alors E = (16x60) 960 lux
Rien ne vous interdit de sélectionner manuellement une sensibilité particulière et indépendante des caractéristiques du film que vous avez éventuellement en place, de sorte que si vous choisissez une ouverture de 2 et une sensibilité de 100 ISO, la formule devient vraiment très simple : E = 2/t. Faites des mesures chez vous en plusieurs endroits (chambre à coucher, couloir, salle de bain, séjour...) et vous serez surpris de constater combien les conditions de luminosité peuvent être différentes. Pour lire votre Aquarama, par exemple, il est conseillé de bénéficier d'au moins deux cents lux !
Vous pouvez aussi "étalonner" votre éclairage en mesurant l'éclairement d'un bel aquarium planté et équilibré. Peut-être trouverez-vous une valeur apparemment faible, par exemple cinq cents lux, mais il faut garder à l'esprit que la valeur de mille cinq cents lux précédemment recommandée n'est qu'indicative et que le chiffre est notamment fonction du spectre lumineux : des sources lumineuses, par ailleurs excellentes, dont le spectre d'émission n'est pas continu, telles le Grolux déjà cité, mettent en défaut les instruments de mesure qui ne détectent pas une intensité aussi élevée que serait celle d'un éclairage blanc de même puissance. Mais, pour les plantes, c'est le contraire ! Quoi qu'il en soit, la procédure est assez simple et intéressante pour que vous ne vous en priviez pas !

Les Cabomba requièrent plus de mille lux..