La maladie des néons
par le Dr M. MARTIN. (Revue Aquarama, 1978)
Néon atteint de Plistophora. Photo : J. Teton |
Terminologie
La " Maladie des Néons " est une appellation impropre
d'une part parce qu'elle n'est pas, comme nous le verrons, l'apanage des
Néons, d'autre part, parce que les Néons peuvent contracter
un certain nombre de maladies qui n'ont pas de rapport avec la "Maladie
des Néons".
Nous conserverons néanmoins cette dénomination consacrée
par l'usage. La plupart des ouvrages anglo-saxons ou germaniques évoquant
cette affection ont conservé ce vocable. Il est commode, et n'est-il
pas plus aisé de parler de " point blanc " que de l'
Ichthyophtiriasis ou de "mousse" plutôt que de "Saprolegniose"
?
Fréquence
Chez Paracheirodon innesi et chez Cheirodon axelrodi c'est
la maladie la plus souvent rencontrée. D'autres espèces
peuvent être contaminées : Nematobrycon palmeri, Hemigrammus
amstrongi, Hyphessobrycon eryythrostigma, Hemigrammus gracilis,
Rasbora pauciperforata, Hemigrammus ocellifer, Hyphessobrycon
herbertaxelrodi, Danio rerio, etc.
De fait nous pensons que la plupart des Characidae, les espèces
sud-américaines notamment, peuvent être contaminées.
En pratique c'est parmi les poissons possédant une bande longitudinale
lumineuse qu'elle est le mieux reconnue.
Contagiosité
L'affection est contagieuse chez le Néon et le Cardinalis. Des
bancs entiers peuvent être détruits en quelques jours. La
maladie des Néons n'a jamais ce caractère endémique
et galopant dans les autres espèces. Lorsque l'affection sévit
dans un bac de compagnie, les Néons et les Cardinalis sont les
premières victimes.
Facteurs déclenchants
C'est à l'occasion de quatres circonstances que la maladie peut
se déclarer dans un aquarium.
1 - Introduction d'un poisson malade.
2 - Hypertermie. C'est un facteur très important. Il explique les
lourdes pertes constatées l'été dans les arrivages.
Notons que l'on provoque assez facilement la maladie en mettant des Néons
à 32° pendant une semaine. Une conséquence pratique
peut être retenue : Les Cheirodons et Paracheirodons sont moins
exposés à 22° qu'à 28° C.
3 - Surpopulation. Elle joue certainement un rôle important car
la maladie des Néons est rare dans les bacs peu peuplés.
4 - Eau exagérément calcaire.
Le germe causal
On ne peut pas affirmer qu'un germe unique peut provoquer la maladie des
Néons. L'étiologie virale n'a jamais été confirmée.
L'origine mycosique n'a plus d'adeptes. Les champignons trouvés
à l'examen microscopique se sont fixés sur le poisson entièrement
affaibli. Ils ne sont pas la cause de la maladie.
Le germe causal est le plus souvent Plistophora hyphessobryconis.
Il n'est pas constamment retrouvé et certains ichthyologues américains
pensent qu'il n'est pas le germe obligatoire. Il apparaît quand
même que la dénomination de Plistophoriose des Cheirodons
est une meilleure désignation que maladie des Néons.
Plistophora hyphessobryconis est un être unicellulaire appartenant
aux Sporozoaires. ll fait partie de la flore habituelle de nos aquariums.
Si les conditions sont favorables (lors d'une brusque hypertermie notamment)
il traverse la peau du poisson et s'introduit dans la musculature où
il forme des Sporoblastes. Ceux-ci vont se développer le long de
la ligne latérale attaquant d'abord le tissu intersticiel du muscle,
puis le tissu noble, c'est-à-dire les fibrilles musculaires qui
seront progressivement dilacérées. Cette dilacération
est certainement la résultante d'actions enzymatiques encore mal
connues, ayant à la fois une action myolytique et mucolytique.
L'ensemble de la musculature sera atteint dans un délai d'une quinzaine
de jours, provoquant la mort par paralysie respiratoire. (Les fibres cardiaques
restent indemnes habituellement.)
L'évolution peut être hâtée par
- un blocage rénal (encrassement calcique) ;
- une complication nerveuse (l'agression initiale près de la ligne
latérale expose ä des troubles précoces de la sensibilité)
;
- une surinfection (Saprolégniose).
Il est possible que la dureté de l'eau et l'élévation
thermique favorise le processus enzymatique qui aboutit à la lyse
musculaire.
A partir des lésions musculaires, les Pansporoblastes peuvent libérer
des spores qui sont diffusés dans l'eau de l'aquarium. Au cas où
les conditions sont favorables, ces spores peuvent se développer,
être avalés par un poisson, absorbés par l'intestin
et de là, partir agresser à nouveau le système musculaire.
Les symptômes
Au début : perte de l'appétit, manque de vitalité,
lenteur des déplacements, mouvements désordonnés,
réactions atténuées.
En quelques jours : la bande lumineuse qui parcourt le poisson
s'affadit, d'abord à sa partie ventrale. Ce phénomène
est facilement constaté dans les espèces possédant
cette bande lumineuse scintillante (néons, gracilis, cardinalis,
H. herbertaxelrodi notamment).
L'affection apparaît moins nette dans d'autres espèces. Elle
se manifeste par des taches de 2 à 3 mm, jaunâtres ou grises,
parfois blanches (achromie), qui tendent à confluer. Les poissons
respirent laborieusement, de façon saccadée et ne s'alimentent
plus.
L'extension de la maladie est lente chez le Coeur saignant, le Tetra noir,
le Robertsi, les Nématobrycons.
L'évolution non traitée : est inexorable. Le poisson
devient cachectique et meurt dans un délai que l'on peut situer
entre 5 et 20 jours, très habituellement par détresse respiratoire
ou intoxication d'origine rénale. La mort est souvent précédée
de troubles nerveux (agitations, convulsions, troubles de l'équilibre)
('). Les nageoires sont attaquées par la Saprolégniose quelquefois
(chez les Hyphessobrycons de grande taille plus particulièrement).
Traitement
Ne pas avoir le réflexe d'élever la température,
ce qui serait catastrophique.
En pratique nous conseillons soit
1) PLISTO PUR, produit commercialisé par SERA. Une seule dose d'une
goutte pour 2 litres d'eau est suffisante. Oxygénation abondante
et suppression 3 jours du filtrage.
2) Aldéhyde formique commercial, avec la même posologie -
1 goutte pour 2 litres d'eau.
Il y a des pertes mais la grande majorité des poissons survit.
Les lésions sont indélébiles. Le Cardinalis par ex.
vivra avec une interruption dans sa ligne lumineuse.
Le traitement préventif consiste à éviter
le surpeuplement, la brusque hyperthermie et à maintenir une eau
pas abusivement calcaire.
(I) Les troubles nerveux apparaissent de façon relativement tardive dans la maladie des Néons, ce qui peut paraitre étonnant si l'on considère que l'aggression initiale se localise le long de la ligne latérale riche en cellules sensorielles. En fait le Plistophora attaque élective-ment, au départ, les fibres musculaires.