Le genre Nemateleotris
par F. de GRAAF(*) adapté par J. SCHNUGG (Aquarama - 1981)
Ce genre témoigne particulièrement bien que c'est grâce
aux appareils de plongée que nos connaissances sur les petits poissons
côtiers, surtout ceux des récifs coralliens, augmentent sans
cesse et que nous leur devons, et devrons encore à l'avenir, la
découverte d'espèces nouvelles.
Nemateleotris decora - Photo A. van den Nieuwenhuizen |
Par sa morphologie N.decora ne se distingue guère de N.magnifica.
Le premier rayon prolongé de la dorsale atteint en général
seulement le tiers de la deuxième nageoire dorsale (chez N magnifica
plus que la moitié). L'extrémité de la caudale est
légèrement incurvée (chez N.magnifica elle est ronde).
La grande différence entre les deux espèces réside
dans la coloration.
Jusqu'à présent on connait cette espèce des îles
Palawan, Salomon, Nouvelle-Bretagne, Nouvelles-Hébrides, côte-est
de la Nouvelle-Guinée, Nouvelle-Calédonie et, dans l'Océan
Indien, de l'ile Maurice. On la trouve principalement du côté
extérieur des récifs coralliens, à des profondeurs
de 27,5 à 67,5 m. Elle fréquente les canaux et bandes sablonneux
à débris.
La seconde espèce nouvelle, Nemateleotris helfrichi, a été,
à ma connaissance, importée une fois seulement, en Hollande.
Nous ne pouvons hélas pas la présenter ici en photo.
Le corps de N.helfrichi a la méme forme que celui des deux
autres espèces. Le premier rayon prolongé de la dorsale
est plus court que chez N.magnifica et rextrémilé
de la caudale est, comme chez N. decora. également légèrement
incurvée. La couleur jaune sur la tète est caractéristique.
Elle va de la pointe du museau jusqu'entre les yeux et environ un tiers
des opercules. On remarque un triangle de couleur lilas, bordé
de rouge pourpre, depuis la base du premier rayon de la dorsale jus-qu'entre
les yeux. Ce rayon a un bord blanc, puis vire au rouge pourpre. Le corps
est lilas, ainsi que la deuxième dorsale et l'anale. La deuxième
dorsale présente un large bord jaune avec une petite tache orange
entre les rayons. Sur l'anale on note du jaune, du noir et du brun-rouge.
Le bord est noir avec des taches oranges. Les pointes des ventrales, qui
sont lilas ou blanc, sont noires.
On connait N.helfrichi des îles Tuamotu, Société,
Marshall et Palawan où il a été observé à
des profondeurs entre 29 et 69 m, aux mêmes endroits que N.decora.
Dans les régions où ces espèces sont présentes,
elles vivent en communauté sans se concurrencer. Les trois espèces
ont le même mode de vie. En général ces poissons "
flottent " à 10-25 cm au-dessus du sol, en position oblique
contre le courant.
Durant la nage le premier rayon de la dorsale est agité en mouvements
irréguliers de bas en haut. On ne connait pas la signification
de ce mouvement, peut être est-ce un signal de communication d'un
individu à l'autre.
Ces poissons se nourrissent de zooplancton, principalement de Copépodes.
Les adultes vivent en général par couples, plus rarement
en solitaires, dans un territoire de 1 m2 environ, autour d'une
caverne ou d'une galerie du sol. En cas de danger ils disparaissent dans
la galerie, la tête la première. On ignore s'ils creusent
eux mêmes ces galeries ou s'ils occupent celles d'autres animaux
en les adaptant à leurs besoins. Dans l'aquarium N. magnifica
occupe une caverne s'il en trouve une, ou choisit un espace libre entre
des roches ou des coraux. Le cas échéant il adopte également
un tube en plastique enfoui dans le sable. Parfois il agrandit la caverne
en prenant du sable dans sa bouche pour le transporter et le recracher
plus loin.
Les juvéniles de ces trois espèces vivent par petits groupes
de 10 à 30 individus, généralement à moins
de profondeur que les adultes. On ignore cependant si dans ce cas chaque
individu possède sa propre galerie ou caverne.
En
haut à gauche : Synchiropus picturatus ; en bas à
gauche Pogonoculius zebra En haut à droite: Synchiropus splendidus ; en bas à droite Anthias squamipimis Photos: A. van den Nieuwenhuizen |
Le genre Nemateleotris appartient à la famille des Gobiidae
et non, comme il est indiqué dans presque toute la littérature
par erreur, à la famille des Eleotridae. Cela a été
prouvé ces dernières années par des examens anatomiques.
Le genre est étroitement apparenté à Ptereleotris,
loglossus et Pogonoculius qui font également partie
des Gobiidae.
Toutes les espèces du genre Nemateleotris sont des pensionnaires
idéals pour l'aquarium d'invertébrés car ils se nourrissent
exclusivement de crustacés et ne touchent à rien d'autre,
autrement dit ils n'abiment pas les invertébrés. On leur
distribue : Mysis, Krill, Daphnies. petits fragments de viande de Moules,
poissons maigres, Tubifex, etc. Dans l'aquarium d'invertébrés
on peut les voir en permanence alors qu'en présence de poissons
très remuants et de grande taille ils sont craintifs, se cachent
et souffrent de la concurrence alimentaire.
La formation d'un couple peut s'observer que dans un très grand
bac. Il se forme au sein d'un groupe de juvéniles, comme c'est
le cas chez les Amphiprions. A la maturité, lors de la formation
d'un ou plusieurs couples, si l'espace est trop réduit pour pouvoir
s'éviter, les mâles livrent des combats qui peuvent causer
des victimes. Ou alors les mâles dominants empêchent les autres
de manger. Les dominés ne quittent plus leur refuge où ils
meurent par la suite. On n'a pas de certitude absolue que ce sont les
mâles qui se combattent car l'identification des sexes est très
difficile. On suppose que le premier rayon prolongé de la dorsale
est plus long chez le mâle que chez la femelle, mais cela reste
à prouver par des examens approfondi...
On peut faire cohabiter les espèces du genre Nemateleotris
par exemple avec Pseudocheilinus, Ptereleotris, Pogonoculius, Meiacanthus,
Centropyge, Anthias, Aeoliscus, Synchiropus et Hoplolatilus.