UN FAUVE POUR L'AMATEUR? TRIAKIS SEMIFASCIATA
Texte: Jean-Jacques ECKERT - Photos: Robert ALLGAYER (Aquarama
- 1989)
De tous temps les squales ont fasciné les êtres humains,
plus particulièrement les espèces mangeuses d'hommes. Certaines
espèces spécifiques à l'art cinématographique
ont même fait la fortune de leur créateur telle celle des
"Dents de la mer". Mais parmi cette famille particulièrement
vorace se trouvent quelques espèces aux intentions moins belliqueuses.
C'est le cas de Triakis semifasciata Girard, 1854.
Portrait d'un Triakis semifasciata |
Il fait partie de la famille des Triakidés qui comprend neuf espèces.
La famille est classée dans l'ordre des Carcharhiniformes. Triakis
semifasciata, de son nom français: requin léopard, fréquente
la baie de San Francisco. On le rencontre également le long de
la côte Pacifique des Etats Unis et du Mexique, allant de l'Oregon
jusqu'au Golfe du Mexique. Les eaux y sont chaudes à tempérées.
Quant à la taille, elle atteint 150 cm pour les mâles et
jusqu'à 210 cm pour les femelles. Le poids maximum est de trente
deux kilos.
Après ces détails scientifiques, venons en au maintien de
ces charmants poissons. C'est lors de l'exposition réalisée
par le club "Les Amis de l'Aquarium 1932" qu'il m'a été
possible de faire plus ample connaissance avec eux. En effet trois Triakis
semifasciata avaient été mis à notre disposition
par un commerçant de la place. Il s'agissait de trois poissons
ayant environ 45 cm pour les plus grands et 25 cm pour le "bébé
requin". Pour des raisons de coût, il est en effet plus aisé
d'importer des jeunes qui nécessitent moins de volume liquide pour
leur transport aérien. Leur transfert s'est effectué dans
une caisse de polystyrène munie d'un aérateur sur piles,
le tout posé dans le coffre d'une voiture, le voyage d'une durée
de deux heures s'est bien passé.
Un superbe bac d'environ huit cents litres attendait leur arrivée.
L'eau de mer d'une densité de 1020 pour une température
de 24 oC était brassée par deux pompes immergées
d'un débit de 1200 l/h chacune.
Elles étaient placées de telle sorte que le circuit de l'eau
fasse un tour complet du bac. De plus deux exhausteurs munis de diffuseurs
devaient assurer un surplus d'oxygénation en cas de grosses chaleurs.
La température la plus élevée fut de 27 °C qu'ils
supportèrent parfaitement. Le sol était constitué
de coquilles d'huitres concassées. Pour le décor de la face
arrière il s'agissait de mousse de polyurétane teintée
dans la masse et recouverte de résine alimentaire. Afin de leur
éviter de se blesser, aucune pièce de corail ne vint compléter
le décor. Il faut savoir que leur vue est des plus faibles. La
filtration se faisait sur des pains de mousse de polyester auparavant
mûris dans d'autres bacs afin d'avoir une flore bactérienne
conséquente.
Triakis semifasciata est un requin de petite taille mais demande un grand espace pour la nage dans l'aquarium. |
Dès leur arrivée, après un goutte à goutte,
et pour la plus grande joie des présents, ils furent lachés
dans leur nouvel environnement. Trois Labroides sp. vinrent les
rejoindre, mais ces derniers moururent rapidement pour une raison inconnue.
Il eut été intéressant d'observer le comportement
interspécifique entre les deux espèces. Au début
il faut éviter de les effrayer, afin qu'ils ne se cognent point
dans les vitres du bac. Après leur acclimatation il n'y a plus
de problèmes. Hélas l'un des requins présentait une
blessure occasionnée soit lors de leur capture, soit lors du transport,
à hauteur de la naissance d'une des nageoires pectorales. Nous
fûmes très inquiets craignant un risque d'infection. Heureusement
tout rentra dans l'ordre en un peu plus de huit jours. Quel pouvoir de
régénération chez ces poissons!
Phénomène curieux, ils reprenaient leur souffle en se reposant
au sol. Ils ne s'affolaient que lors de l'ouverture du bac, car pour eux,
cela correspondait à l'heure du repas. Le nourrissage avait lieu
tous les deux jours, avec de plus un jour de jeûne par semaine.
La pitance principale était constituée d'éperlans
décongelés et de morceaux de seiche. Elle leur convint à
merveille. Seule une montée de nitrite, rapidement jugulée,
ainsi que la blessure furent nos seules inquiétudes. Bien sûr
étant donné leur taille adulte, il n'est point recommandé
de les maintenir chez soi, à moins d'être le propriétaire
du bac nécessaire à leur bien être. Il vaut mieux
les réserver aux aquariums publics disposant du volume d'eau nécessaire
à leur confort. Ce n'est pas sans un pincement de coeur que nous
les avons ramenés à leur propriétaire après
trois mois de pension, retour assez folklorique puisqu'ils furent placés
dans un aquarium (en verre svp!), rempli aux deux tiers, lui même
reposant sur le plancher d'un break!
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